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LE DOCTEUR OMÉGA

irritable. Le souvenir du docteur me hantait de nouveau.

J’essayai de jouer du violon…

Je manquai toutes mes harmoniques et mon archet, mal équilibré dans ma main, grinça lamentablement sur les cordes.

C’était désespérant.

Je frappai du pied avec colère et sortis.

Je gagnai alors la terrasse et m’accoudai sur le mur qui surplombait la route.

J’étais furieux… furieux d’avoir mal dormi… d’avoir eu ce maudit cauchemar… furieux aussi de songer sans cesse à ce docteur Oméga qui aurait dû m’être tout à fait indifférent.

Quelle fatalité me poussait donc à toujours m’occuper de cet homme ?

Certains experts en sciences psychiques ne manqueraient pas d’expliquer cet état d’âme singulier par un phénomène de télépathie ou de transmission de pensée, mais rien entre le docteur Oméga et moi ne pouvait donner lieu à semblable supposition. Comment deux êtres qui ne se sont jamais vus, qui s’ignorent réciproquement, pourraient-ils se trouver en communion d’esprit ?…

J’en étais là de mes réflexions quand j’entendis au-dessous de moi, sur la route, une petite voix chevrotante, nasillarde, horripilante.

Je me penchai en dehors du mur et ne pus retenir un cri de stupéfaction.

Cette voix !… c’était celle du docteur Oméga… oui… c’était lui que j’avais devant les yeux… C’était bien l’homme que m’avaient dépeint mes domestiques.

Et il chantait !… il chantait !… quelques heures après l’affreuse catastrophe qui probablement avait dû faire des victimes.

C’était inouï… incompréhensible !!