Page:Galopin - Le Docteur Oméga, 1906.djvu/120

Cette page a été validée par deux contributeurs.
114
LE DOCTEUR OMÉGA

Mais il ne fit que quelques pas, battit l’air de ses mains et s’affaissa en murmurant :

— Mon Dieu, qu’ai-je donc ?… que se passe-t-il ?…

Le docteur, dont je voyais briller les petits yeux, s’approcha de moi en rampant et me murmura à l’oreille d’une voix à peine perceptible :

— Courage, monsieur Borel, dans quelques instants, quand la nuit sera venue, nous nous sentirons tout à fait bien.

Et comme il devina mon étonnement :

— Ce sont ces arbres, ajouta-t-il, ces plantes bizarres qui nous anéantissent… et nous tuent… Vous avez sans doute entendu parler du mancenillier de l’Amérique centrale et de la Colombie, à l’ombre duquel on trouve le sommeil et parfois la mort… Eh bien ! Les plantes martiennes ont les mêmes propriétés. Elles contiennent un germe dangereux qui agit sur nous, pauvres terriens, avec une intensité surprenante.

Il faut que nous nous habituions à la flore de ces régions… mais, tranquillisez-vous, cher ami, dans quelques instants, ces arbres dangereux auront vécu… ils s’abattront sur le sol où ils ne tarderont pas à être réduits en poussière… Avec le premier froid de la nuit cette somnolence qui nous étreint, cette torpeur, cet anéantissement disparaîtront.

Le docteur ne se trompait pas.

Bientôt nous entendîmes de légers craquements assez semblables à ceux que produit la glace en s’accrochant aux rives d’un fleuve, puis nous perçûmes très distinctement une crépitation continue qui allait en augmentant.

Un vent glacial rasait maintenant le sol, nous gelant jusqu’aux moelles.

La nuit martienne s’approchait à grands pas, amenant avec elle un abaissement soudain de température et les