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Il n’était pas en effet au départ ce matin. Il voyage à sa guise, tantôt devançant le convoi, tantôt le suivait. Sur le fleuve, sa pirogue apparaît tout à coup aux tournants, là où rien ne fait prévoir sa présence, et disparaît de même.

— L’Indien a disparu, dit à nouveau Marthe.

Et je vois bien qu’elle connaît le mystère.

C’est encore l’heure lente et langoureuse de la sieste.

— Marthe, pourquoi m’avez-vous appelé dans la pirogue ?

— …

— Il y a quelque chose de changé. Hier encore, les hommes étaient résolus. Ils sont aujourd’hui semblables à des mercenaires insoumis.

— …

— Et vous… vous êtes comme au premier jour du placer, vous êtes redevenue la femme pour laquelle les hommes se battaient.

Elle rit. Ses dents aiguës luisent ; ses lèvres, rouges comme des lèvres fardées, s’offrent à l’amour, voluptueusement. Ses yeux mi-clos ont de longs regards obliques, des regards froids et pénétrants de chatte aux aguets. Tout son être respire la cruauté, le désir et l’indifférence.