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la ruée s’élance. Des milliers d’hommes, venus de tous les points de l’horizon, s’abattent tout à coup sur une tête de crique, mystérieusement désignée dans l’hallucination collective. En quelques jours, du sol défoncé, de la montagne éventrée, sort le trésor caché.

Chaque jour, le fleuve voit passer les caravanes de ces demi-fous qui vont, sans guides, presque sans vivres, à peu près nus, sur une route inconnue. Un prodigieux instinct les conduit et les protège.

Nul n’a jamais écrit l’épopée du peuple des mineurs noirs. Ils ont de la boue jusqu’au ventre ; ils marchent, grelottant de faim et de fièvre, luttant jusqu’à la mort, pour arracher à la terre sa poudre d’or.

Ils ont souffert comme des damnés, la plupart sont morts ensevelis dans leur rêve, emportant avec eux la vision qui les guidait.

L’or rapporté par les vivants aurait permis de construire, sous les palmistes de Cayenne, la ville magique d’El Dorado. Combien de palais aux toits d’or s’élèveraient sur la Savane ?…

Nul n’a jamais écrit la légende des mineurs guyanais.

L’histoire sublime, écrite sur l’eau boueuse des fleuves, s’en est allée dans le sillage des pirogues.