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LXVIII


Semblables aux animaux de la forêt les hommes de la brousse songent d’abord à leur nourriture.

Les forçats, harassés par une journée de pirogue, grillent au bout de longues baguettes le porc salé. Des poissons empalés se dorent sur la braise.

La pluie, qui tombe depuis l’aurore, glisse sur les cheveux des hommes assis et sur leurs vêtements mouillés.

La forêt ruisselle ; le sol détrempé fume avec des relents de cloaque. Le vent humide qui semble s’élever de la terre elle-même, déverse l’eau accumulée sur les feuilles des arbres.

Le froid et l’obscurité envahissent le camp. La lueur du feu faiblit ; des formes apparaissent qui passent et vivent dans la nuit.

Un dernier crépitement de branches consumées, des craquements sourds de bambous, puis des souffles, comme des froissements d’étoffes de soie, l’haleine de la forêt endormie…