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TATERLEY
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Le visiteur sourit.

— Le motif de ma visite n’est pas si désagréable que ça, dit-il en prenant la chaise que Donald lui tendait. Je voulais d’abord m’assurer que vous étiez bien la personne que je recherchais.

— Je suis Donald Brett, dit le jeune homme intrigué.

— Je suis heureux alors, monsieur Donald Brett, de vous annoncer que j’ai de bonnes nouvelles à vous apprendre.

Ella poussa un petit cri à peine perceptible. Le jeune homme s’avança près d’elle, sans quitter des yeux l’avoué. Puis il prit la main d’Ella dans les siennes, pendant que l’homme d’affaires lui parlait.

— Une somme d’argent vous a été laissée, une somme de plus de quarante mille livres et elle a été mise à votre crédit chez mes banquiers. On m’a donné l’ordre de vous en instruire et de remplir les formalités nécessaires. Je dois vous présenter à la banque, vous me comprenez, je crois ?

Cette dernière question était nécessaire, car Donald était tombé à genoux près de sa femme, et il regardait l’avoué d’un air abasourdi.

— Quarante mille livres ! Quarante mille livres ! Oui, je comprends.

Il se leva, alla vers la cheminée et s’y appuya la tête entre ses mains. Tout d’un coup, il se retourna d’un air fou et s’écria :

— Dites donc, ce n’est pas une farce idiote ? Non, je vous demande pardon, je crois que c’est vrai. Quarante mille livres, Ella !

Il l’entoura de son bras. En un moment elle fut sur sa poitrine, oubliant tout, ne pensant qu’à la splendeur de la nouvelle existence qui allait s’ouvrir devant eux après ces paroles magiques !

Ils restèrent embrassés pendant quelques moments, l’avoué feignant d’être absorbé dans ses papiers. Puis Donald se redressa, dans son attitude familière et juvénile, le bras toujours autour de la jeune femme. Mais, se souvenant de sa faiblesse, il la replaça doucement sur le sofa.

— Certaines conditions sont attachées à ce legs, monsieur Brett, dit l’avoué. L’une d’elles est que vous ne devrez jamais demander, ni à moi, ni à personne, ni chercher à savoir d’où vous vient cette somme.

— Mais c’est un conte de fée, Ella, murmura Donald en se penchant sur la jeune femme.

— Tout ce que je puis vous dire, c’est que cet argent vous est laissé par un ami de votre mère, morte. Il est mort aussi et il ne m’est pas permis de vous en dire plus. J’ajoute que personne ne disputera vos droits. Toute cette somme est à vous, monsieur Brett, mais ne me demandez rien de plus.

— C’est étrange, dit Donald. J’aurais bien voulu savoir quel est ce généreux donateur. À propos, je vous demande pardon, j’ai été si surpris que j’ai tout oublié. Permettez-moi : ma femme.

Knightly salua Ella.

— Permettez-moi de vous féliciter, Mrs Brett. Vous venez d’être très malade, sans doute.

— Très malade, dit Donald. Voyez-vous, nous étions si pauvres. Ça m’est égal de vous le dire à présent, mais nous allons changer tout cela. Nous allons aller quelque part où les roses reviendront sur vos joues, chérie, et où vous apprendrez à chanter encore. Je crois que je vais devenir fou de joie !

Il se mit à se promener dans l’atelier, gesticulant, prenant des objets, les laissant retomber, serrant les mains de Knightly. Riant et sifflant.

— Qui ça pourrait-il bien être, Ella ? Enfin, il ne faut pas le demander. Quarante mille livres ! Plus de quarante mille livres !

L’avoué riait, satisfait de sa commission.

— Et maintenant, monsieur, si vous voulez venir à la banque, vous serez mis