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instituées par ces grands flambeaux des premiers siècles de l’Église, qui nous servent de guides vers le Christ ; cérémonies si importantes qu’elles suffisent à elles seules, pourvu qu’on veuille bien en approfondir le sens, à nous initier aux dogmes de la foi. Souvent l’assistance régulière à l’office divin a amené des hommes, manquant d’éducation, complétement illettrés, à une perfection chrétienne, à une science bien plus haute que celle des plus savants de ce monde. Cette indifférence pour les saints usages de l’Église ne se conçoit pas, surtout chez nous, où ils sont si intimement liés aux souvenirs patriotiques que le mot orthodoxe exprime à la fois notre religion et notre nationalité.

Celui qui aime les siens, qui est habitué à la douce vie de famille, célèbre fidèlement les jours d’allégresse ou de douleur, consacrés par le souvenir de ceux qui lui sont chers. Si ces parents ne sont plus, il en porte scrupuleusement le deuil ; s’il a encore le bonheur de les posséder, il accourt les embrasser à leurs jours de fête, il tient à commencer avec eux la nouvelle année, il les rejoint pour Pâques et Noël, qu’une antique coutume veut que l’on passe ensemble, — inutile de le lui rappeler, — aucune distance ne l’arrête pour venir prendre sa place au banquet de famille ; il rentre sous le toit paternel comme la tourterelle vole vers son nid, et il y trouve une consolation inexprimable comme l’amour dont elle découle.

Pourquoi ne témoignons-nous pas un amour semblable à notre Rédempteur ? Comment ne nous souvenons-nous pas de tout ce qu’il a enduré pour nous ? Comment ne songeons-nous jamais à tout ce qu’il a souffert sur la croix ? Comment pouvons-nous être indifférents pour ces jours bénis qui, annuellement, renouvellent à notre mémoire ses grands exploits ? Si nous nous souvenions de l’agonie du Fils de Dieu, n’aurions-nous pas conscience de trouver trop rigoureux le Carême, l’abstinence des mercredis[1] et des vendredis, institués du temps des Apôtres pour honorer le crucifiement du Seigneur ? Si chaque Pâques était pour nous une véritable résurrection, nous aurions soin de nous y préparer par l’assistance aux offices divins qui la précèdent, au lieu de ne pas discontinuer ces plaisirs profanes qui mettent obstacle aux plus simples devoirs de religion. D’où vient une telle insouciance pour les fêtes de l’Église dans des hommes qui cultivent si tendrement les joies et les douleurs de famille ? Ne provient-elle pas de ce qu’on a grandi dans une igno-

  1. Les Grecs font maigre le mercredi au lieu du samedi. (Note du traducteur.)