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DES LIEUX AFFECTÉS, VI, v.

telle nature se rencontre chez les torpilles de mer ; elles ont une si forte puissance, que l’altération est transmise à la main du pêcheur à travers son trident, de sorte que cette main devient sur-le-champ engourdie. Ce sont là des preuves qui témoignent suffisamment qu’une petite quantité de substance peut produire de grandes altérations par le seul contact ; cela ne s’observe pas moins aussi dans la pierre d’Héraclée qu’on appelle encore magnétis (cf. Oribase, t. II, p. 798) : le fer qu’elle touche reste suspendu après elle, sans qu’aucun lien 1’attache ; un deuxième morceau approché de celui qui vient d’être ainsi accroché s’attache à lui et pend comme le premier ; le même phénomène se répète avec un troisième morceau de fer.

Puisque certaines substances jouissent manifestement d’une très-grande force, il nous faut rechercher si dans les animaux il peut se former une corruption d’une nature telle qu’elle ait une qualité et une puissance semblables au venin des animaux, ou bien cela n’est-il pas décidé par les médecins qui se sont posé ce problème : y a-t-il ou non des caractères propres au poison. Ceux qui paraissent avoir le mieux parlé accordent que les mêmes symptômes se révèlent après l’administration d’une substance vénéneuse et à la suite d’une corruption développée dans notre propre corps ; cependant on peut distinguer ceux qui sont malades pour avoir pris du poison de ceux qui le sont quoique n’en ayant pas pris. En effet, si un individu qui a naturellement des humeurs saines, et qui a, de toute manière vécu conformément aux règles de l’hygiène, meurt tout à coup, comme on meurt après avoir ingéré un poison violent ; s’il prend ensuite une couleur livide, ou noire ou rosée ; si enfin son corps tombe en déliquium, ou exhale une odeur insupportable de pourriture, on dit qu’il a pris du poison (cf. III, xi). Si donc on concède que des affections telles que celles qui suivent l’administration d’un poison, s’emparent de nous en prenant naissance dans notre propre corps, il n’y a rien d’étonnant à ce qu’un sperme vicié, ou que le sang des règles également vicié, retenu et corrompu, produisent des symptômes fâcheux dans des corps prédisposés à être atteints, de maladies. On peut, en effet, apprendre en considérant les chiens combien a de puissance une prédisposition à être affecté d’une manière quelconque : aucun autre animal n’est en proie à la rage, le chien seul en est atteint ;