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DES LIEUX AFFECTÉS, II, ix.

sentir, tantôt la piqûre d’une aiguille, tantôt la perforation du trépan ; d’autres fois, ils se croient rompus, déchirés, ou bien c’est un sentiment de tension ou de traction, ou une sensation de pesanteur telle, que ce poids semble pendre des parties situées au-dessus, ou presser sur les parties environnantes. Toutes ces façons de parler sont intelligibles ; mais les douleurs resserrantes, astringentes ou âpres sont des expressions inintelligibles autant qu’inutiles. C’est ce qu’aurait du comprendre Archigène, lui qui voulait nous enseigner le diagnostic des lieux affectés. Si le diagnostic ne se tire pas de ce que nous disent les malades eux-mêmes, tout ce que l’on peut dire sur les souffrances ne serait qu’un long bavardage. Or, si c’est des malades qu’il faut apprendre de quelle manière ils souffrent, et si les malades n’accusent jamais une douleur âpre, acerbe, ou inflexible, ou ductile, encore une fois cet enseignement est sans utilité. Du reste, les raisonnements mêmes par lesquels on prétend prouver qu’Archigène avait entrepris d’expliquer les propriétés des diverses douleurs, démontrent à la fois l’impossibilité et l’inutilité de cette doctrine. Et d’abord, toute propriété est inexprimable, selon les sectateurs d’Archigène. S’il en est ainsi, il est évidemment impossible de la transmettre par l’enseignement ; car elle ne saurait être connue que de ceux qui l’ont perçue par la sensation. De plus, nous ne connaissons chaque espèce de douleur qu’après l’avoir éprouvée ; mais peut-être Archigène a-t-il souffert dans toutes les parties de son corps. Supposons que cela soit : qui pourra croire qu’un seul homme ait souffert tous les maux dans chaque partie de son corps ? Mais admettons encore cela, bien que cela soit impossible. Archigène a-t-il jamais ressenti les souffrances dont l’utérus est le siége ? Évidemment non. Cependant il décrit les douleurs particulières qui l’affectent, connues seulement des femmes qui en souffrent. Aussi, je l’avoue, par les Dieux, je me suis souvent demandé par quelle suite de raisonnements il était parvenu à former cette étrange doctrine. En supposant qu’elle soit vraie, on ne saurait accorder qu’elle soit utile, car aucun malade ne fera jamais comprendre ce qu’il souffre en se servant de la terminologie d’Archigène.

Les malades se plaignent quelquefois d’éprouver de l’anxiété à l’orifice de l’estomac ; et nous le comprenons aisément pour l’avoir nous-mêmes éprouvée. Il en est de même pour la défail-