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DES FACULTÉS ATTRACTIVE ET ALTÉRATRICE.

qu’il est utile de savoir comment les aliments sont cuits dans l’estomac, serait-il superflu de savoir comment la bile est produite dans les veines ? Et faut-il s’occuper de son évacuation seulement et ne pas s’inquiéter de sa production ? Comme s’il ne valait pas bien mieux prévenir dès le principe une trop grande production de ces humeurs que d’avoir l’ennui de s’en débarrasser. Il est étonnant qu’on doute si c’est dans le corps qu’il faut placer la production de cette humeur, ou s’il faut dire qu’elle est immédiatement renfermée dans les aliments venant du dehors. Si ce doute est légitime, pourquoi ne pas rechercher aussi, à propos du sang, si c’est dans le corps qu’il prend naissance ou s’il est répandu dans les aliments, comme le prétendent ceux qui admettent l’hypothèse de l’homoïomérisme ? Et cependant il serait bien plus utile de rechercher quels sont, parmi les aliments, ceux qui sont en harmonie avec la fonction de la sanguification et ceux qui y sont contraires, que de chercher quels sont ceux qui sont aisément domptés par l’action de l’estomac, quels sont ceux qui résistent et qui luttent. En effet le choix de ceux-ci importe à la coction seulement ; le choix de ceux-là importe à la production d’un sang utile ; car ce n’est pas chose égale qu’un sang utile ne soit pas produit ou que la nourriture ne soit pas bien liquéfiée (chylifiée) dans l’estomac. Comment Érasistrate n’a-t-il pas honte, tandis qu’il détaille tous les mauvais succès de la coction, qu’il énumère et qu’il rapporte les circonstances où ils se produisent, de ne pas dire un mot, pas même une syllabe, sur les défauts de la sanguification. Pourtant on trouve dans les veines un sang épais ou ténu, plus rouge chez les uns, plus jaune chez les autres ; plus noir chez ceux-ci, plus chargé de phlegme chez ceux-là. Si l’on réfléchit encore que le sang est odorant, non pas d’une seule façon, mais en présentant des différences très-nombreuses, que le langage ne saurait retracer et que les sens distinguent très-nettement, on sera porté, je pense, à blâmer assez rigoureusement l’incurie d’Érasistrate, qui néglige des considérations si nécessaires aux œuvres de l’art.

Les erreurs évidentes où il tombe au sujet des hydropisies sont une conséquence logique de cette négligence. L’idée que c’est l’étroitesse des conduits qui empêche le sang de se porter bien en avant du foie, et que jamais l’hydropisie ne se produit dans une autre circonstance, ne trahit-elle pas la dernière incurie ? L’idée aussi