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DES FACULTÉS NATURELLES, I, xv-xvi.

le sang contenu dans la veine cave aille à eux de même que tout le vin est poussé dans la chausse. L’exemple du lait réduit en fromage éclaircira ma pensée. Ce lait, déposé tout entier dans les éclisses, ne filtre cependant pas tout entier, la portion assez ténue pour passer à travers les intervalles des joncs tombe en bas, et c’est ce qu’on appelle le sérum (petit-lait). L’autre partie épaisse qui doit être le fromage, ne pouvant passer par les trous de l’éclisse, ne s’échappe pas. Si donc le sérum du sang doit être filtré par les reins de la même façon, il faut que tout le sang aille aux reins et non pas qu’une partie y aille tandis que l’autre n’irait pas. Or que nous montre la dissection ? C’est qu’une portion de la veine cave remonte au cœur [à partir du foie], tandis que l’autre s’appuie au rachis sur lequel elle s’étend jusqu’aux membres abdominaux. Ainsi l’une n’approche même pas des reins, l’autre en approche, mais ne s’y insère pas. Or si le sang avait dû s’y purifier comme dans des cribles, il aurait fallu qu’il s’y portàt tout entier et qu’ensuite la portion ténue fût précipitée en bas, tandis que la portion épaisse aurait été retenue en haut. Dans la réalité il n’en est pas ainsi, car les reins sont situés de chaque côté de la veine cave. Ils ne filtrent donc pas comme des cribles l’urine qu’amènerait cette veine, n’ayant eux-mêmes aucune faculté [qui réponde à cet effet] ; mais ils l’attirent évidemment. C’est la question qui reste encore à résoudre.

Comment donc l’attirent-ils ? Si, comme le pense Épicure, toutes les attractions se font par les rebondissements et les entrelacements des atomes, il est réellement préférable de dire que les reins n’attirent aucunement ; car l’examen d’une pareille théorie montrerait qu’elle est bien plus ridicule que nous ne la trouvions tout à l’heure à propos de la pierre d’aimant. L’attraction s’opère donc comme le veut Hippocrate. Nous allons en parler plus explicitement dans la suite de la discussion ; notre but actuel n’étant pas d’éclaircir ce point, mais de prouver qu’il n’y a de cause possible de la sécrétion de l’urine que l’attraction des reins, et que l’attraction ne s’opère pas comme le supposent ceux qui ne reconnaissent à la nature aucune faculté propre ; car s’il est accordé qu’il existe effectivement dans les corps soumis aux lois de la nature une puissance attractive, chercher à expliquer autrement la distribution de l’aliment serait de l’enfantillage.