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ÉPILOGUE.

En le rendant apte à saisir de loin, la nature en eût nécessairement fait un membre difficile à porter ; aussi lui a-t-elle donné une grandeur telle qu’il ne devînt pas trop lourd. Donc, pour un homme qui cherche à reconnaître réellement les ouvrages de la nature, le bras seul, avant la dissection, suffit pour les lui révéler ; mais celui que j’ai appelé l’ennemi de la nature, lors même qu’il contemplerait l’art intérieur du bras, art que j’ai exposé dans les deux premiers livres de ce traité, consacrerait ses veilles à chercher un moyen de calomnier quelque chose de ce qu’il verrait. De même quelle personne, si elle considère avec l’amour de la vérité la symétrie de grandeur dans les jambes et l’utilité de chaque mouvement, ne louera et même n’admirera l’artifice de la nature ? Si vous supposez un homme ayant les jambes moitié grandes de ce qu’elles sont dans la proportion convenable, vous comprendrez d’abord, du moins je le pense, combien le corps qui les surmonte sera difficile à porter et lourd ; en second lieu, combien la marche sera chancelante, et, en troisième lieu, combien la course sera impossible. Si vous considérez encore la proportionnalité de la cuisse avec la jambe, de la jambe avec le pied, et enfin des diverses parties du pied et de la main, vous reconnaîtrez l’art parfait de la nature ; car les parties de ces deux extrémités sont admirablement symétriques entre elles, de même qu’il y a une symétrie non moins admirable entre le bras et l’avant-bras, entre l’avant-bras et la main, et entre les diverses parties de la main, les unes par rapport aux autres. Tout cela montre l’art de l’ouvrier. La proportionnalité des doigts seuls suffirait, à qui n’est pas un contempteur par caractère, pour révéler aussi l’art de la nature. Pourquoi, en effet, n’existe-t-il aucun homme qui ait les doigts trois fois plus longs qu’ils ne sont, ou pourquoi, au contraire, leur longueur n’est-elle pas réduite à celle de la première phalange ? Je réponds : parce qu’une pareille dimension, la grande ou la petite, nuirait à leur utilité.

Mais toi, ô très-brave contempteur des œuvres de la nature, tu ne vois rien de tout cela, parce que tu t’aperçois seulement que parmi des milliers d’hommes il y en a un qui a six doigts. Polyclète se fut-il un peu trompé dans des milliers de statues, tu ne le lui reproches pas, et tu accuserais de méchanceté celui qui l’en blâmerait. Retournez donc la proposition, et voyez ce que vous