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DES MŒURS DE L'ÂME.

Ceux qui pensent que l’âme est la forme du corps, pourront dire que c’est la proportion exacte des éléments dans le tempérament, et non la sécheresse, qui rend l’âme plus sage ; en cela, ils seront en désaccord avec ceux qui pensent que plus le tempérament est sec, plus l’âme devient sage, et lors même qu’ils ne voudraient pas concéder que la sécheresse est une cause d’intelligence, je pourrais du moins invoquer le témoignage d’Héraclite lui-même[1] car n’a-t-il pas dit : âme sèche, âme très-sage[2], pensant que la

  1. Ἀλλὰ εἰ ξηρότητα μὴ ξυγχωρῆσαι ἐναντίαν εἶναι συνέσεως, εἴ γε μὴν ὑφ᾽ Ἡρακλείτου vulg. ; ἀλλ᾽ καὶ ξηρότητα συγχωρήσομεν αἰτίαν εἶναι συνέσεως, οἵ γε μὴν ἀμφ᾽ Ἡρακλ. Cod. Flor., leçon qui me parait donner un texte fort embarrassé, et rompre le fil du raisonnement. Il est évident que ce membre de phrase a subi dans tous les manuscrits plus d’un genre d’altération, et qu’il faut y opérer des corrections pour le rendre intelligible. Gataker (l. l., coll. 553-4), qui n’avait sous les yeux que le texte vulgaire, propose ἀλλὰ οὐ καὶ τῷ ξηρότητα συγχωρῆσαι μὴ ἐναντίαν εἶναι συνέσεως, et il interprète : at non, quin consessuri sunt, siccitatem perspicacitati non adversari. Ce sens est rationnel, mais on n’y arrive que par des corrections violentes. Il me semble plus simple et plus conforme au contexte de lire, ainsi que me le propose M. Bussemaker… συγχωρήσαιεν αἰτίαν et de traduire comme je l’ai fait. — Quant au second membre de phrase, on doit lire : εἴρηταί γε μὴν ὑφ᾽ Ἡρ. avec Gataker (l. l.), ou εἴ γε μὴν πείθειεν ὑφ᾽ Ἡρ. avec Arnoldus Bootius.
  2. Le texte de Galien, dans les manuscrits et dans les imprimés, porte αὐγὴ ξηρὴ σοφωτάτη ; mais si on a recours à Stobée (Florileg., tit. V, § 120 ; voy. les notes de M. Gaisford, t. I, p. 175), qui rapporte aussi cette sentence d’Héraclite d’Éphèse en ces termes : αὔη ψυχὴ σοφωτάτη καὶ ἀρίστη, on voit évidemment qu’il faut, dans Galien, lire αὔη pour αὐγὴ (substitution très-facile à expliquer) et que ξηρὴ a été primitivement une glosse de ce mot αὔη changé plus tard en αὐγὴ. — Cet adjectif αὔος ne paraît pas très-usité ; voy. Eustathius dans ses Scolies sur l’Iliade d’Homère (p. 897, l. 16 et p. 1304, l. 3) ; voy. aussi Érotien, éd. de Franz, p. 44, au mot αὐασμόν, et Foës Œcon. Hipp. voce αὐαίνειν. — La sentence d’Héraclite, avec ou sans le nom de son auteur, a été citée par plusieurs anciens ; mais par une coïncidence qui n’a rien d’extraordinaire et qui ne justifie en rien la leçon du texte de Galien, on lit ordinairement ξηρὴ ; et quand le mot αὔη se trouve seul, il a subi sous la main des copistes les transformations les plus singulières, par exemple il est devenu αὑτή ou οὑ γή. — Voy. par exemple Plutarque, De esu carnium, I, 6, 4, et le fragment de Musonius (Περὶ τροφῆς) dans l’édit. de Peerlkamp. Ce savant éditeur, égaré sans doute par Wesseling, n’a pas vu quelle était la vraie leçon (cf. ses notes, p. 325) ; mais M. Gaisford, dans ses notes sur Stobée (tit. XVII, § 43), d’où est tiré le fragment de Musonius a rétabli αὔη comme au tit. V, § 120. — Gataker, dans ses Advers. miscell. posth. (chap. xiv, col. 550 et 553 suiv.), a fait sur la sentence d’Héraclite et sur les diverses altéra-