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DES MŒURS DE L'ÂME.

telligence lorsqu’elle commence à être attachée à un corps mortel ; mais lorsque le flux, source de l’accroissement et de la nutrition, est moins impétueux, lorsque les révolutions de l’âme reprennent leur route paisible et qu’avec le temps elles s’affermissent davantage, chaque cercle tournant suivant sa forme naturelle, leurs circonvolutions se régularisant et, désignant avec justesse l’autre et le même[1], elles achèvent de rendre sensés ceux qui les possèdent (p. 44 a). » — Lorsque Platon dit : « Le flux, source de l’accroissement et de la nutrition, est moins impétueux, » il parle évidemment de l’humidité qu’il avait déclarée auparavant être la cause du défaut d’intelligence de l’âme, de telle sorte que [suivant ce philosophe lui-même] la sécheresse procure l’intelligence et que l’humidité fait tomber en démence. Mais s’il est vrai que l’humidité cause la démence, et la sécheresse l’intelligence, une extrême sécheresse procure une intelligence parfaite, et une sécheresse mélangée d’humidité ôtera à l’intelligence une somme de perfection proportionnelle à la quantité d’humidité dont elle est imprégnée. Quel corps d’animal est aussi exempt d’humidité que celui des astres[2] ? Aucun, certes, n’en approche sous ce rapport ; en sorte que nul corps d’animal mortel ne se rapproche de l’intelligence parfaite sans participer à l’inintelligence au même degré qu’à l’humidité. Lors donc que la partie rationelle de l’âme qui a une essence spéciale, change avec les tempéraments du corps, que doit-on penser qu’éprouve l’espèce mortelle ? N’est-il pas évident que cette espèce est complétement l’esclave du corps ? Il vaut même mieux ne pas se servir des mots être esclave, mais dire que la partie mortelle de l’âme n’est elle-même que le tempérament du corps, car il a été démontré plus haut que l’âme mortelle est le tempérament du corps. Donc, le tempérament du cœur est la partie irascible de l’âme. Celui du foie est la partie que Platon appelle concupiscible, et qui est nommée par Aristote nutritive et

  1. Voy. sur l’autre et le même, H. Martin, note 21, §§ 4 et 5, dans Études sur le Timée de Platon, t. I, p. 358 suiv.
  2. On pourra voir dans Dupuis (Origine de tous les cultes, chap. vii, t. I, p. 257 suiv.), les divers passages des auteurs, d’où il résulte que la croyance à l’intelligence divine des astres était généralement répandue dans l’antiquité.