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DES MŒURS DE L'ÂME.

où Platon professe que l’humidité du corps ôte à l’âme la mémoire des choses dont elle avait conscience avant d’être liée au corps ; c’est ce qu’il dit, en effet, textuellement dans le Timée, là où il raconte que les Dieux ont créé l’homme en liant une âme immortelle dans un corps, siége d’un courant d’affluences et d’effluences, désignant certainement ainsi, d’une manière obscure, l’humidité de la nature des enfants nouveau-nés[1]. Après cela il ajoute : « Enchaînées dans ce vaste courant du fleuve, les âmes ne domptaient pas[2] et n’étaient pas domptées ; elles étaient entraînées par la force, et entraînaient à leur tour » (p. 43 a). Un peu plus loin, il ajoute : « Le flot qui inonde le corps et s’en échappe, le flot d’où vient la nutrition étant très-abondant, les affections produites dans chaque animal, par les agents extérieurs (c’est-à-dire par les sensations), causaient encore un plus grand trouble (p. 43 b). » Après avoir énuméré ces sensations, Platon ajoute : « Au début, à cause de toutes ces affections, l’âme est d’abord sans in-

  1. Ici encore Galien me paraît détourner, à son profit, la pensée de Platon sur l’autorité duquel il veut appuyer ses théories. Dans le passage qui est cité ici par extraits, Platon paraît bien évidemment faire allusion aux courants en sens contraire qui résultent, au début de la vie, de la nutrition même du corps (voy. surtout p. 44 b) ; seulement il est douteux s’il entend parler des premiers essais qu’il suppose avoir eu lieu pour la formation de l’homme, ou de la vie intra-utérine, ou encore (mais cela me paraît la supposition la moins vraisemblable) du premier développement de l’enfant nouveau-né. En tout cas, il me semble positif qu’il n’entend certainement pas la simple prédominance des parties liquides (ou des humeurs) dans le corps à un certain âge, ainsi que le veut Galien, car pour Platon le trouble de l’intelligence vient moins des liquides considérés en eux-mêmes, que de la contrariété et de l’irrégularité des courants de la nutrition.
  2. Οὔτ᾽ ἐκράτουν. Ces deux mots manquent dans le texte de Galien, mais ils se lisent dans celui de Platon et sont indispensables. — J’ajoute ici une fois pour toutes, et pour ne pas trop multiplier les notes, que j’ai corrigé les extraits empruntés par Galien à Platon ou à Aristote, sur les meilleurs textes de ces auteurs, toutes les fois que le sens l’exigeait et quand le texte n’avait pas été changé à dessein. Lorsque j’ai ajouté, d’après le texte de Platon ou d’Aristote, quelques mots qui ne me paraissaient cependant pas indispensables, je les ai mis entre crochets. Pour certains passages seulement, j’ai cru devoir signaler les différences entre le texte de Galien et celui des auteurs originaux. Du reste, ces différences peuvent tenir au mauvais état des Mss,, d’après lesquels notre traité a été publié, plus encore qu’à Galien lui-même.