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DES MŒURS DE L'ÂME.

en sorte que l’essence de l’âme sera aussi un mélange, soit, si vous voulez des qualités élémentaires, l’humidité et la sécheresse, le froid et la chaleur, soit, si vous le préférez, des corps élémentaires, l’humide, le chaud, le froid, le sec. J’ai démontré que les puissances de l’âme sont la conséquence de son essence, puisque ses actes en sont eux-mêmes la conséquence. Si donc la partie rationnelle (ou pensante) de l’âme est une espèce d’âme, cette espèce sera mortelle, car elle est elle-même un certain tempérament de l’encéphale. En conséquence, toutes les espèces et toutes les parties de l’âme auront des puissances en rapport avec leur tempérament ; telle sera l’essence de l’âme[1]. Mais si l’âme est immortelle, comme le veut Platon, cet auteur aurait bien fait de nous expliquer, comme il a coutume de le faire pour tout ce qui concerne l’âme, pourquoi elle émigre quand l’encéphale est ou trop froid ou trop chaud, ou trop sec ou trop humide (car d’après Platon, la mort arrive par la séparation de l’âme d’avec le corps), et pourquoi une évacuation abondante de sang, ou la ciguë, prise à l’intérieur, ou une fièvre brûlante, la fait aussi émigrer. Si Platon vivait, je l’apprendrais volontiers de lui ; mais puisqu’il ne vit plus, et qu’aucun de ses disciples n’a pu m’indiquer aucune cause pour laquelle l’âme, sous l’action des influences que je viens d’énumérer, est obligée de quitter le corps, je ne crains pas de dire que toute espèce de corps n’est pas propre à recevoir l’âme rationnelle, car il me semble que cela est une conséquence de la doctrine de Platon sur l’âme, bien que je n’en puisse fournir aucune démonstration, attendu que moi je ne sais plus quelle est l’essence de l’âme, si nous la regardons comme étant du nombre des substances non corporelles. Dans les corps, je vois des tempéraments nombreux et qui diffèrent beaucoup entre eux ; mais pour une essence incorporelle qui peut subsister par elle-même, et qui n’est ni qualité ; ni forme du corps, je ne me figure aucune différence, bien que j’aie souvent examiné et que

    cipe à ses qualités chaude et froide, humide et sèche ; mais il y a encore loin de là à admettre avec Galien que cette âme résulte du tempérament même du corps.

  1. On peut voir dans le traité De præsag. ex puls. (II, 8, t. IX, p. 305), que pour Galien, « l’essence des puissances ou facultés n’est pas autre chose qu’un certain tempérament. »