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DES MŒURS DE L'ÂME.

ment rationnelle désire (ce mot étant pris dans son sens le plus général) la vérité, la science, les études, la compréhension, la mémoire, et, pour le dire en un mot, toutes les belles choses. Le désir de la liberté, de la victoire, de la puissance, de la domination, de la considération publique, des honneurs, est le partage de l’âme irascible. L’espèce d’âme que Platon appelle proprement concupiscible a un désir insatiable des plaisirs de l’amour, des aliments et des boissons. Ni cette âme ne peut avoir une convoitise pour le beau[1], ni l’âme rationelle ne peut en avoir pour les plaisirs de l’amour, pour les boissons, pour les aliments, non plus que pour la domination, la gloire, ou les honneurs. De même l’âme irascible ne saurait avoir les mêmes penchants que l’âme rationnelle et l’âme concupiscible.


Chapitre iii. — Platon regarde comme immortelle l’âme qui réside dans le cerveau, Galien ne sait si cette opinion est vraie ou fausse ; il s’occupe d’abord des deux autres âmes certainement mortelles. — L’âme étant la forme du corps, suivant Aristote, et la matière et la forme du corps étant essentiellement constituées par le mélange des quatre qualités, l’âme est aussi constituée par ce mélange, et ses puissances dépendent elles-mêmes de ce mélange. Si l’âme était, comme le veut Platon, une essence incorporelle, comment pourrait-on se rendre compte de la mort, des différences que présentent les âmes, et de l’action que les influences matérielles exercent sur l’âme.


Nous avons démontré ailleurs[2], d’une part, qu’il y a trois espèces d’âmes, et que c’est le sentiment de Platon ; d’une autre part, que ces trois âmes habitent l’une dans le foie, l’autre dans le cœur, la troisième dans l’encéphale ; enfin, que Platon paraît convaincu que de ces espèces ou de ces parties de l’âme, la rationelle est immortelle. Quant à moi, je n’ai pas d’argument péremptoire pour discuter avec lui si cette opinion est vraie ou fausse[3]. Occupons-nous donc d’abord des espèces d’âmes qui sont

  1. Οὔτε τῆς αὐτῆς ψυχῆς ὄρεξιν τοῠ καλοῠ δυναμένης, vulg. — Οὔτε τῆς αὐτῆς ἐπιθυμητικῆς, κ. τ. λ., ms. Flor. Ce texte ainsi restitué est donc en parallélisme avec le membre de phrase qui le suit (οὔτε τῆς λογιστικῆς ἀφροδισίων, κ. τ. λ.).
  2. Dans la dissertation Sur la philosophie de Galien, je traduis ou j’indique les passages auxquels il est fait allusion ici et qui, pour la plupart, sont tirés du traité Des dogmes d’Hipp. et de Platon.
  3. Voy. sur la question de la mortalité et de la matérialité de l’âme la dissertation précitée, on y trouvera un extrait de la discussion de Jean Philopone, de Meletius, et d’autres auteurs contre Galien.