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EXHORTATION A L'ÉTUDE DES ARTS.

vant seulement de ses mains. Rassemblant, dans un premier effort, tout ce qu’il avait de force, il écarta les deux côtés de l’arbre ; les coins étant alors tombés, il ne put faire éclater le reste du tronc, malgré ses vigoureuses tentatives ; épuisé, il ne put retirer ses mains prises entre les deux éclats revenus sur eux-mêmes ; elles furent broyées. Telle fut la cause de la fin misérable de Milon[1]. Certes il lui a été bien peu utile dans cette occasion d’avoir pu porter dans le stade, un taureau mort ! Est-ce la vigueur que Milon a déployée dans cette circonstance qui aurait pu sauver la république des Grecs engagée dans la guerre contre les barbares ? N’est-ce pas plutôt la sagesse de Thémistocle qui, ayant interprété convenablement l’oracle, fit la guerre avec succès[2] ?

« Car un sage conseil l’emporte sur un grand nombre de bras ; l’ignorance armée est le pire des maux[3]. »

Eurip., Antiop. fragm., 205, 30, ed. Dind., Oxon. 1851.

Le régime des athlètes n’est donc, je crois l’avoir démontré avec évidence, utile à rien de ce qui regarde la pratique de la vie. Pour vous convaincre maintenant que dans les exercices gymnastiques, considérés en eux-mêmes, il n’y a rien qui ait quelque valeur, je vais vous raconter un apologue composé en vers épiques[4] par un de ces hommes qui ne sont pas ennemis des Muses. Le voici :

  1. L’histoire de Milon et de son genre de mort est racontée par divers auteurs, entre autres par Pausanias (VI, xiv, 5-8) et par Valère Maxime (IX, xii, 9).
  2. Voy. Cornélius Népos, Themistocles, chap. ii. — L’oracle d’Apollon Pythien est rapporté par Hérodote (VII, cxli).
  3. C’est à peu près dans le même sens que Cicéron (De officiis, I, xxii) a dit : « Parvi enim sunt foris arma, nisi est consilium domi. »
  4. Dans les éditions d’Aide et de Bâle, cette fable est imprimée sermone soluto ; dans une grande partie de son étendue, le texte, considéré en lui-même et tel que le donnent les Mss., est très-loin de la forme épique ; on y trouve peu d’hexamètres réguliers (Faber les avait pris pour des iambes. Voy. Gataker, l. inf. cit.) ; il y a donc lieu de douter que Galien ait cité cette fable en conservant partout le rhythme et la mesure ; il faudrait alors admettre que certaines parties du texte ont été singulièrement altérées par les copistes, qui cependant ont en général respecté les autres citations envers semées dans le traité qui nous occupe. Jamot, Goulston, Chartier et Willet n’ont reçu dans leur texte que quelques hexamètres. On pourrait encore dégager plusieurs fragments de vers sans faire aucune violence au texte. Gataker (Adv. misc. part. III, chap. iii, p. 420-421)