Page:Galien-Oeuvres anatomiques physiologiques et médicales-T1-1854.djvu/72

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
40
EXHORTATION A L'ÉTUDE DES ARTS.


Chapitre xii — Que la profession d’athlète, loin de donner la beauté, disloque les membres et défigure le visage.


Maintenant que nous avons parlé du plus grand de tous les biens corporels, de la santé, passons aux autres[1]. Voici comment les athlètes sont partagés du côté de la beauté : non-seulement ils ne retirent sous ce rapport aucun avantage de leur profession, mais encore il arrive que beaucoup d’entre eux, dont les membres sont parfaitement proportionnés, tombent entre les mains des maîtres de gymnase qui les engraissent outre mesure, les surchargent de chair et de sang, et les rendent entièrement contrefaits. Quelques-uns même, ceux surtout qui exercent le pancrace ou le pugilat, ont le visage défiguré et hideux à voir[2]. Quand enfin

  1. Ici Galien, comme le remarque Willet, admet la division vulgaire des biens corporels, mais dans le traité intitulé : Si l’hygiène fait partie de la médecine ou de la gymnastique (xiv-xv, t. V, p. 828-9), il la combat en ces termes : « Certaines personnes soutiennent qu’il existe non pas un seul bien du corps, mais trois : la santé, la force et la beauté, et qu’il est possible de concevoir l’existence de deux arts, l’un qui procure ces biens, l’autre qui les conserve ; je dois les réfuter, et d’abord je montrerai qu’il n’y a pour le corps qu’un seul bien primitivement et proprement dit auquel tous les autres se rapportent ; les autres avantages appelés biens du corps ne sont, ceux-ci qu’une partie, ceux-là que la cause de ce bien ; enfin, d’autres en sont, pour ainsi dire, le fruit. En effet, puisque les belles couleurs, la belle carnation, la symétrie et certaines autres qualités, constituent la beauté, qui empêche que le bien corporel soit constitué par la réunion de la santé, de la force et de la beauté ? Qui empêche ensuite que, d’un côté, le bien du corps lui-même soit la santé, et que, de l’autre, la beauté et l’activité des fonctions soient un fruit de cet état de santé ? Qui empêche encore que l’activité des fonctions soit le premier bien du corps, et que la santé en soit la cause ? Car ce n’est pas une chose qui rend le corps sain et une autre qui le rend fort ou beau ; mais tout cela est exactement sain. D’où il résulte qu’il n’y a qu’un seul art traitant le corps, car en faisant les mêmes choses, nous jouirons tout à la fois d’une grande activité dans les fonctions, de la beauté, de la santé et d’une bonne apparence ; de même, si nous commettons quelque faute nuisible à notre corps, nous détruisons l’énergie de nos fonctions, nous compromettons notre beauté, nous diminuons notre bonne complexion, et nous affaiblissons notre santé ; car toutes ces choses croissent ou diminuent en même temps. »
  2. Les fractures du nez, mais surtout celles des oreilles, étaient très-fréquentes dans les luttes du gymnase ; aussi les médecins anciens parlent-ils plus fréquemment que les modernes de ce genre d’accident, qu’on voit même représenté sur les statues