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DES YEUX ET DE LEURS ANNEXES.

hommes cette indifférence dont ils sont possédés au sujet des choses les plus belles.

Peut-être ne serait-il pas sans intérêt de rapporter les opinions de nos devanciers sur la jonction des nerfs : Les uns prétendent que c’est pour n’éprouver aucune lésion, étant situés en ligne droite, que les nerfs, après avoir subi d’abord une flexion à l’intérieur, s’écartent en dehors ; — d’autres pensent que c’est pour se communiquer leurs affections et partager la douleur éprouvée par l’un d’eux ; — d’autres disent que les sources de toutes les sensations devaient remonter à une source unique. Si on se contentait de soutenir qu’il faut que la vision remonte à un seul principe, en montrant la grandeur du mal, s’il n’en était pas ainsi, évidemment on aurait dans ce cas énoncé la vérité, et nous n’aurions pas eu besoin d’imaginer la démonstration que nous venons de donner ; mais maintenant après avoir dit, et dit avec raison, que le sensorium principal recevant toutes les sensations doit être unique, on se persuade ensuite que c’est pour cette raison que les nerfs mous se rencontrent, et en cela on commet une très-grande erreur.

L’encéphale, il est vrai, est le réservoir commun de toutes les sensations, autrement il faudrait supposer que ni les nerfs des oreilles et de la langue, ni ceux de toutes les autres parties de l’animal ne remontent à un principe unique ; de même imaginer que les nerfs se rejoignent pour partager leurs affections, c’est aller à l’encontre de la prévoyance de la nature, laquelle se propose habituellement un but tout différent, comme nous l’avons déjà démontré à plusieurs reprises (voy. particul., liv. VI, chap. xvii, p. 442). Il est préférable, en effet, si cela est possible qu’aucune partie ne participe en rien à la douleur d’une autre.

Si l’on trouve juste ce raisonnement on peut en faire usage comme de cet autre, savoir : que les nerfs se seraient aisément rompus, s’ils eussent été étendus en ligne droite. Pour moi, ce dernier raisonnement même ne me satisfait pas. Les nerfs qui aboutissent à l’estomac, tirés en bas par le poids de l’estomac, auraient été, il est vrai, plus d’une fois rompus, s’ils ne se fussent d’abord enroulés autour de l’œsophage ; mais les conduits qui viennent aux yeux (nerfs optiques) n’auraient rien eu de semblable à souffrir, car les yeux sont loin d’être aussi pesants que