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UTILITÉ DES PARTIES DU CORPS HUMAIN, X, ix.

née, renversée, relevée vers le sourcil ! Accordons ce point, la paupière s’ouvrira sans peine ; mais dites-nous un peu comment elle se fermera ? On ne peut, en effet, engendrer un autre muscle de la paupière inférieure pour l’insérer sur le tarse [de la paupière supérieure], ceci serait un grand bavardage, ni des parties internes [et supérieures] fixer ce muscle en dessous à la paupière supérieure. Car d’abord, dans cette supposition, la paupière tendue par un semblable muscle loin de se fermer, se replierait vers l’intérieur et formerait un double repli ; ensuite le muscle même aurait une position très-étrange, comprimant l’œil et par lui comprimé, resserré, gêné dans son mouvement. Il est donc juste, ce me semble, de s’étonner que des sophistes incapables de pénétrer, d’expliquer les œuvres de la nature, l’accusent néanmoins d’inhabileté. Ils auraient dû, je pense, au nom de l’équité, prouver qu’il valait mieux que les yeux ne fussent pas pourvus de paupières, que d’en avoir d’immobiles, ou qu’elles eussent un mouvement mais involontairement, ou que leur mouvement fût volontaire, mais que les muscles fussent disposés de telle ou telle façon. Mais ils sont si habiles que le mouvement des paupières étant manifeste, ils ne comprennent pas comment il s’opère et ne peuvent imaginer quelque autre mouvement ! Ils sont si fous qu’ils ne reconnaissent pas encore un artiste dans celui qui a façonné et combiné des parties si nombreuses et si importantes !

S’il y avait discussion parmi des artisans touchant une maison, une porte, un lit ou quelque autre objet semblable, sur la meilleure disposition à lui donner pour l’usage auquel il est destiné et que tous les autres étant embarrassés, un seul d’entre eux trouvât un heureux expédient, il serait admiré justement et réputé un artisan habile. Et les œuvres de la nature que nous sommes incapables, je ne dis pas d’imaginer d’avance, mais même de connaître à fond en les voyant réalisées, nous ne leur accorderons pas une admiration plus grande qu’aux inventions humaines ! Mais laissons là ces sophistes et considérons ce qu’il y a d’admirable dans le mouvement des paupières, en expliquant d’abord les opinions de nos devanciers les plus instruits.

Il a été déjà dit précédemment quelque part (chap. vii), que sous la peau qui recouvre la paupière, il existe des membranes minces. C’est le point de départ de mon raisonnement, En effet,