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DES YEUX ET DE LEURS ANNEXES.

physique (c’est-à-dire naturel ou involontaire), comme les mouvements de l’estomac, des intestins, des artères, du cœur et de beaucoup d’autres organes sont indépendants de la volonté et de la décision. Mieux vaut, en effet, selon eux, mentir qu’avouer son ignorance ; sur certains sujets le mensonge n’est pas découvert par la foule. Mais quand le soleil brille sur la terre, à tous les yeux, si on prétend qu’il n’y a ni clarté, ni jour, on passera pour un fou. Et si quelqu’un vient dire qu’en marchant ce n’est pas volontairement que nous avançons les jambes, mais involontairement et mécaniquement, cet homme ne paraîtra pas moins fou que le précédent ; car s’il est possible de les mouvoir plus vite ou plus lentement, en faisant des pas plus ou moins grands, en arrêtant tout à fait le mouvement ou en le reprenant, comment n’y aurait-il pas de la folie à prétendre que l’action est involontaire et mécanique ? Si donc il nous est impossible, nos yeux étant fermés, de les maintenir en cet état autant que nous voulons, puis de les ouvrir à notre gré, puis de les refermer encore, et de faire alternativement ces choses autant qu’il nous plaît, le mouvement des paupières ne dépend pas de nous. Mais si nous pouvons sans empêchement accomplir ces actions comme nous voulons et autant que nous voulons, pourvu que nos paupières soient dans leur état normal, évidemment le mouvement des paupières supérieures s’opère par notre volonté. En effet c’est inutilement qu’elles nous auraient été données par la nature, si lorsqu’un corps extérieur se dirige contre l’œil pour le frapper et le blesser, nous ne pouvions volontairement fermer les paupières.

De telles assertions ne doivent pas étonner de la part de sophistes, qui n’ont pas souci de la vérité mais seulement du bruit qu’ils font. Une pareille impudence est une preuve éclatante des artifices habiles de la nature. En effet, le mouvement des paupières supérieures étant visible à nos yeux sans que nous puissions indiquer comment il s’accomplit, ni découvrir les muscles qui l’opèrent, si nous eussions eu nous-mêmes à façonner les animaux, comme la fable le raconte de Prométhée, qu’aurions-nous fait ? Évidemment nous aurions laissé privée de tout mouvement la paupière supérieure ; mais diront-ils peut-être, on eût inséré sur tout le bord de la paupière les muscles engendrés par le sourcil. De cette façon, ô gens habiles, toute la paupière aurait été retour-