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UTILITÉ DES PARTIES DU CORPS HUMAIN, VIII, ii.

partie à laquelle se rapportent les mouvements et les sensations. Ou si ce n’est pas l’encéphale, mais le cœur qui est le principe de tous ces phénomènes, c’est avec raison que chez les acéphales les organes des sens ont été fixés dans la poitrine ; car, de cette façon, ils se dirigent vers le cœur qui est situé près d’eux ; c’est au contraire à tort que chez les autres ils sont rattachés à l’encéphale. Ceux qui ont cette opinion doivent trouver la tête d’autant plus superflue qu’ils ne sauraient indiquer une utilité de l’encéphale, ni loger autour de lui les organes des sens. Imaginer, en effet, que l’encéphale a été créé en vue de la chaleur naturelle du cœur pour le rafraîchir et le ramener à une température modérée, cela est tout à fait absurde. Dans cette supposition, la nature, au lieu de le placer si loin du cœur, ou l’aurait donné comme enveloppe au cœur, comme elle a fait du poumon, ou du moins elle l’aurait établi dans le thorax, mais elle n’eût pas suspendu à l’encéphale les principes de tous les sens.

Eût-elle poussé la négligence au point de l’éloigner du cœur, elle n’avait du moins aucunement besoin d’y rattacher les sens ; mais elle n’eût pas séparé ces deux organes par deux enveloppes si solides et si épaisses, en recouvrant du crâne le premier et du thorax le second. Eût-elle encore négligé ces conditions, elle n’aurait certainement pas établi le cou entre les deux organes, cou si long dans les animaux dont le sang est le plus chaud et qui tirent leur nom de leurs dents acérées (καρχαρόδοντα, carnassiers), cou plus long encore dans les oiseaux, en sorte que chez eux l’encéphale est aussi distant du cœur que le sont les pieds. Autant vaut dire, à mon avis, que le calcanéum a été créé en vue du cœur. Et n’allez pas croire que je plaisante en parlant ainsi ; un examen attentif

    le cerveau proprement dit n’existe pas plus sans la tête que la tête n’existe sans le cerveau ; d’où il résulte nécessairement que la tête a été créée pour l’encéphale, quand il y a un encéphale, et non pas seulement pour les yeux, comme le prétend Galien ; ou plutôt il y a coexistence constante de la tête et du cerveau. Quant à l’existence de l’encéphale lui-même, elle se rattache à un ensemble de dispositions organiques que nous exposerons ailleurs. C’est aussi pas suite de l’existence même d’une tête, dans laquelle est logé le centre nerveux, que les sens spéciaux y ont trouvé leur place ; donc ce n’est pas à cause des yeux que la tête a été primitivement créée, mais c’est parce que la tête existe que les yeux y ont été attachés. Aristote a donc complétement raison contre Galien.