Le législateur d’Athènes, Solon, est peut-être digne d’éloges pour avoir affranchi le fils, auquel son père n’aurait appris aucun art, du soin de le nourrir dans sa vieillesse[1]. Comme[2] les arts s’exercent surtout à l’époque où le corps est dans son éclat, il arrive à beaucoup de jeunes gens doués d’une beauté remarquable, de négliger la culture de leur âme, et d’être obligés plus tard, mais quand cela ne leur sert plus à rien, de répéter avec le poëte :
« Puisse la beauté qui m’a perdu périr misérablement[3] ! »
Ils se rappellent alors la pensée de Solon qui recommandait de considérer surtout la fin dans la vie[4] ; ils jettent à la vieillesse une malédiction qu’ils méritent, et ils reconnaissent la vérité de ces vers d’Euripide :
« Il n’est pas sur de posséder une beauté qui dépasse la beauté ordinaire. »
Il faut, comparant la beauté des jeunes gens aux fleurs du printemps, savoir que ses charmes ont peu de durée[5], et reconnaître la justesse de ces vers de la Lesbienne :
- ↑ Voy. Plutarque, Vit. Solon, xxii, p. 197 (t. I, p. 360, éd. R.), il paraît aussi qu’à Sparte Lycurgue avait privé des droits de citoyens les pères qui négligeaient l’éducation de leurs enfants.
- ↑ Tout ce membre de phrase, où il est fait une allusion détournée à un vice infâme, se lie assez mal avec le commencement du chapitre auquel Willet a voulu le rattacher ; ce n’est point, en effet, quand la faute vient des enfants, mais quand elle vient des parents, que la loi de Solon, très-contestable du reste dans son principe, doit recevoir son application. On doit admettre que le texte a subi ici quelque altération ou mutilation, et séparer le membre de phrase en litige de ce qui le précède pour le réunir par le raisonnement à celui qui commence par ces mots : Ils se rappellent alors…
- ↑ Wyttenbach et Willet regardent ces vers comme appartenant à une tragédie indéterminée d’Euripide, mais je ne les vois point figurer dans la dernière collection des fragments de ce poëte, donnée à Oxford en 1851 par G. Dindorf ; il n’est pas du tout certain qu’ils doivent lui être rapportés.
- ↑ C’est tout ce que nous savons de ce précepte de Solon. Bergk, dans son édition des poëtes lyriques, a négligé de relever ce passage. Des omissions analogues se remarquent pour Pindare et pour d’autres poëtes.
- ↑ Théocrite, dans ses Idylles (XXIII, 28), a exprimé cette idée avec sa grâce