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DES ORGANES DE LA VOIX.

s’y déverser de la tête une sérosité phlegmatique non bénigne[1] ; que dans la déglutition, il devait y pénétrer fréquemment tantôt quelques gouttes de boisson, tantôt même quelques fragments d’aliments, que l’inspiration devait parfois entraîner un air d’une qualité acre, chargé de particules de suie, de cendre, de charbon ou de quelque autre substance délétère ; que dans la toux l’on rejette souvent du pus de nature maligne et mordicante, ou quelque autre humeur, bile jaune, bile noire ou pituite salée pourries intérieurement, toutes matières devant nécessairement entamer, ronger et ulcérer le cartilage. Or, les médecins vous apprendront[2], si vous-même vous ne pratiquez pas la médecine, que les affections des cartilages sont complètement incurables ou très-difficiles à guérir. Vous n’aurez pas besoin de leur enseignement à cet égard, si-vous êtes déjà instruit à l’école de l’expérience. Pour la tunique qui recouvre les cartilages de l’artère, elle est très-facile à guérir, et toute affection qui s’y engendre se dissipe aisément (!), à moins qu’une partie de cette tunique rongée par une pourriture considérable n’ait laissé complétement à nu le cartilage. Alors il n’est plus facile de guérir une semblable affection, non certes à cause de la tunique, mais parce que le mal a pénétré jusqu’au cartilage. Ce fait rare deviendrait fréquent, si naturellement le cartilage était à nu.

Mais pourquoi la tunique était-elle à la fois mince, dense et modérément sèche ? Plus épaisse qu’elle n’est effectivement, outre qu’elle n’eût rendu aucun service, elle eût encore empiété notablement sur la capacité de l’artère. Poreuse, elle n’empêcherait pas l’écoulement des humeurs qui parcourent sa surface de pénétrer jusqu’au cartilage sous-jacent ; elle-même, s’humectant aisément, eût rendu la voix rauque. C’est encore pour cette même raison qu’elle est modérément sèche ; car les corps secs résonnent mieux que les corps humides, comme aussi les corps complétement secs

  1. Voy., sur les flux qui de la tête se portent au pharynx, Oribase, t. II, p. 812, note sur les apophlegmatismes.
  2. Cf. Hippocrate, Aph. VI, 19 ; VII, 28 ; Coaq. 495, où cet auteur est d’avis qu’un cartilage coupé ni ne repousse, ni ne se réunit ; — Galien, De semine, I, xi, professe une doctrine semblable. — Cf. aussi Aristote, Hist. anim., III, viii, où l’on trouve la même proposition, presque dans les mêmes termes que ceux dont s’est servi Hippocrate.