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DES ORGANES RESPIRATOIRES.

Quoi de mieux approprié au cœur que l’air pour le rafraîchir ? Quoi de plus utile que le sang pour servir d’aliment ? Il me semble que le cœur eût rompu quelqu’un des vaisseaux en usant à la fois de toutes ses puissances d’attraction, si le Créateur de l’homme n’eût, pour prévenir un semblable accident, imaginé dans cet endroit un expédient admirable en plaçant, au devant de l’un et de l’autre des orifices qui exercent la fonction d’introducteurs des matières, une cavité particulière en guise de réservoir de l’aliment, afin que le vaisseau ne coure pas risque d’être rompu, si parfois le cœur vient subitement à tirer avec force, puisque son étroitesse ne lui permet pas de fournir abondamment tout ce que demande le viscère. Emplissez d’air un vaisseau et videz-le en attirant l’air par la bouche à travers l’orifice, vous le briserez si vous y mettez de la violence. De même le cœur, qui a besoin de remplir rapidement sa cavité, beaucoup plus considérable que la capacité des deux vaisseaux, les aurait, en tirant violemment, déchirés et rompus, si une cavité extérieure n’eût été fixée au-devant de lui, telle qu’elle existe effectivement, grâce aux deux oreilles.

Les oreilles du cœur n’ont donc pas été créées inutilement, leur nom (ὦτα, oreillettes des modernes) seul est frivole[1] : car il semble qu’elles ne sont pas d’une médiocre utilité pour les animaux. En effet, il est de la plus haute importance qu’aucun dommage n’arrive à l’artère qui se distribue dans le poumon (veine pulmonaire) ou à la veine-cave ; il est certain que les oreillettes rendent aux animaux le plus grand service. Ces deux vaisseaux, pour ne pas parler des autres particularités de structure, ont des tuniques minces, l’un parce qu’il est tout à fait veine, l’autre, parce qu’il valait mieux, nous l’avons démontré (chap. x et note 2 de la p. 407), que l’artère du poumon fût veineuse. Mais un vaisseau mince et mou, s’il est plus propre à se contracter aisément, est aussi plus susceptible de se rompre s’il est tendu, Ainsi, les deux vaisseaux conducteurs des matières dans le cœur eussent été déchirés aisément, étant pourvus de tuniques minces et molles, et tirés violemment par la dilatation du cœur, si la nature n’eût pas imaginé l’expédient qu’offrent les deux cavités des oreilles.

La disposition de ces oreilles non seulement prévient tout danger

  1. Voy. note 2, de la p. 433.