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QUE LE BON MEDECIN EST PHILOSOPHE.

hommes se rendent coupables sont engendrées par la passion de l’argent, qui les séduit, ou par la volupté, qui les captive. Ainsi le philosophe possède nécessairement les autres vertus, car toutes se tiennent, et il n’est pas possible d’en posséder une quelconque sans que les autres suivent, comme si elles étaient enchaînées par un lien commun. S’il est vrai que la philosophie soit nécessaire au médecin et quand il commence l’étude de son art, et quand il se livre à la pratique, n’est-il pas évident que le vrai médecin est philosophe ? Car il n’est pas besoin, je pense, d’établir par une démonstration qu’il faut de la philosophie pour exercer honorablement la médecine, lorsqu’on voit que tant de gens cupides sont plutôt des vendeurs de drogues que de véritables médecins, et pratiquent dans un but tout opposé à celui vers lequel l’art doit tendre naturellement.

Maintenant disputerez-vous sur les mots, déraisonnerez-vous au point de dire, qu’être maître de soi-même, tempérant et contempteur des richesses, constitue un médecin honorable mais non pas un philosophe ; que connaître la nature du corps, les fonctions des organes, les usages des parties, les différences des maladies, les indications thérapeutiques, ne s’acquiert pas par la pratique de la science logique ? Ne rougissez-vous pas d’être d’accord sur les choses et d’être en dissension sur les noms ? Il vaut mieux maintenant, quoiqu’un peu tard, vous montrer sage, ne plus disputer sur les mots comme un geai ou un corbeau, mais vous enquérir de la vérité des choses. Certes vous n’oseriez pas dire qu’un tisserand ou un cordonnier peut devenir bon ouvrier sans apprentissage et sans s’être exercé, mais qu’on peut être tout à coup sage, juste, habile dans la dialectique et dans la connaissance de la nature sans maître et sans pratique. Si un pareil langage est impudent, et si l’autre appartient à un homme qui dispute sur les mots et non sur les choses, nous devons philosopher si nous sommes vraiment les disciples d’Hippocrate ; et si nous agissons ainsi, rien ne nous empêchera, non-seulement de lui ressembler, mais même de lui être supérieurs, en apprenant ce qu’il a si parfaitement enseigné et en découvrant ce qu’il n’avait pas encore trouvé.


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