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UTILITÉ DES PARTIES DU CORPS HUMAIN, IV, ii-iii.



Chapitre ii. — Comparaison des veines avec les portefaix qui transportent le blé du grenier à la boulangerie, et du foie avec une boulangerie. — Origine du nom de la veine porte. Comparaison des ouvrages et des soufflets automates de Vulcain avec les parties du corps.


Ces veines sont comme les portefaix des villes. Ceux-ci prennent le blé nettoyé dans le grenier et le portent à une des boulangeries communes de la cité, où il sera cuit et transformé en un aliment déjà utile : de même les veines conduisent la nourriture élaborée dans l’estomac à un lieu de coction commun à tout l’animal, lieu que nous appelons foie (ἧπαρ). La route qui y mène, coupée de nombreux sentiers, est unique. Elle a reçu d’un ancien habile, je pense, dans les choses de la nature[1], le nom de porte (πύλη sillon de la veine porte), qu’elle a gardé jusqu’à ce jour. C’est ce nom que lui donnent aussi Hippocrate[2], et tous les disciples d’Esculape, rendant hommage à la sagesse de leur devancier qui assimila l’économie animale à l’administration d’une cité.

De même qu’Homère[3], chante ces ouvrages (trépieds) automates de Vulcain[4], ces soufflets qui, sur un ordre du maître,

  1. On ne sait pas du tout quel est cet ancien, ni s’il fut médecin ou philosophe. Il en est souvent des dénominations comme des inventions ; les siècles adoptent les unes et perfectionnent les autres sans en savoir la première origine. — « Le foie, dit ailleurs Galien (Manuel des dissections, VI, xi, init.), reçoit à sa partie concave les veines qui viennent du mésentère ; on appelle portes du foie le lieu vers lequel toutes ces veines se réunissent en un seul tronc. Vous trouverez donc là une très-grande embouchure de veine (veine porte). » Ce que les anciens appelaient portes du foie, c’est le point d’immergence du tronc de la veine porte dans le sillon transversal, ou ce sillon lui-même. — Voy. la Dissertation sur les termes anatomiques.
  2. De natura ossium, p. 1., éd. de Bâle, Épid. II, iv, 1, t. V, p. 122, éd. Littré ; De anat., § 5, éd. de Triller dans ses Opuscula, t. II, p. 272 ; cf. aussi Hoffmann, l. l., p. 59, et les notes de Triller ; Platon (Timée, p. 71 c) se sert aussi de cette expression. Cf. Aristote, Hist. anim., I, xvii, § 6, p. 16, et VII, viii, § 2, p. 142, éd. Bussem.
  3. Cette citation est empruntée au livre XVIII de l’Iliade, où Homère peint l’entrevue de Thétis et de Vulcain ; cf. Hoffmann, l. l., p. 59-61 ; Galien, De fœt. form., cap. vi, t. IV, p. 607 suiv., et ma Dissertation sur la physiologie de Galien.
  4. Χρύσεα δὲ σφ᾽ ὑπὸ κύκλα (sc. τρίποδας) ἑκάστῳ πυθμένι θῆκεν,
    Ὄφρα οἱ αὐτόματοι θεῖον δυσαίατ᾽ ἀγῶνα,
    Ἠο᾽ αὖθις πρὸς δῶμα νεοίατο, θαῦμα ἰδέσθαι
    (l. l., v. 375-7).