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DU MEMBRE ABDOMINAL.

sance et de grandeur dans les parties motrices que dans les parties mises en mouvement. C’est donc avec raison que la nature en appliquant le péroné à la partie externe du tibia, l’a donné pour rempart aux muscles et aux vaisseaux, et a placé dans l’intérieur plusieurs muscles destinés à mouvoir le pied. Si elle n’eût placé en cet endroit qu’un seul grand os, et qu’elle l’eût entouré à la partie externe des vaisseaux et des muscles sans défense, elle eût, de cette façon, rendu le membre entier épais et lourd. On aurait aussi tort de dire qu’il eût mieux valu créer à la partie supérieure et inférieure des épiphyses par lesquelles il se serait articulé aux os voisins, tandis que la diaphyse de l’os serait restée mince dans toute l’étendue de la jambe. Le péril eût été grand pour ces apophyses[1], particulièrement pour celles de l’astragale, qui eussent dépassé de beaucoup l’axe de l’os. N’est-il donc pas juste d’admirer ici encore la prévoyance du Créateur qui, pour deux résultats avantageux, quoique opposés, a construit, dans une harmonie et un rapport exact, les parties du membre entier. La partie supérieure devant être supportée par l’inférieure, cette dernière devait être naturellement plus forte et plus grande, comme cela se voit dans les colonnes, les murs, les maisons, les tours et toutes les choses inanimées. D’un autre côté, comme la partie supérieure devait mouvoir et que la partie inférieure devait être mue, il était raisonnable que la première fût plus grande et plus forte, comme cela existe pour l’humérus, le cubitus et la main. Ainsi, pour porter aisément le fémur, le tibia devait préférablement être plus fort ; mais pour être mû facilement il devait l’être moins ; l’alternative étant obligatoire, puisque les deux conditions ne pouvaient être unies, il était raisonnable, en optant pour la plus utile, de tenir quelque compte de l’autre. Dans un organe créé pour la marche, une conformation appropriée au mouvement est de beaucoup plus utile que celle qu’eût exigée la sûreté de la sustentation. C’est pour ce motif que la nature a fait le tibia plus petit que le fémur, mais il ne lui est pas tellement inférieur qu’il ne puisse le supporter avec aisance. Ici rappelez-vous le principe énoncé dès le commencement (I, ix) ; il faut,

  1. Voy. sur les apophyses et les épiphyses, la Dissertation sur les termes anatomiques.