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UTILITÉ DES PARTIES DU CORPS HUMAIN, I, ix.

turelle des doigts que la division entre les doigts soit profonde et que le pouce soit opposé à l’index. » Si vous demandez pourquoi, vous avez la réponse écrite : « Tout est en sympathie dans l’universalité des parties, et dans les parties tout est en sympathie pour l’opération de chacune d’elles (voy. chap. viii). » — Quelle est donc l’opération d’une de nos parties, de la main ? La préhension, évidemment. Comment donc tous les doigts concourraient-ils à cet acte s’ils n’étaient pas séparés entre eux par un grand intervalle et si le pouce n’était pas opposé à l’index ? tandis que disposés de cette façon toutes les opérations des doigts s’exécuteront très-bien. Si vous cherchez à connaître la bonne disposition des yeux et du nez, vous la découvrirez en comparant la structure de ces parties avec leurs fonctions. C’est là la règle, la mesure, le criterium de la bonne disposition naturelle et de la beauté véritable. En effet, la beauté véritable n’est autre chose qu’une excellente structure. Sur la foi d’Hippocrate, vous jugerez de cette excellence par les fonctions et non par la blancheur, la mollesse et certaines autres qualités semblables qui nous représentent une beauté fardée, empruntée, et non la beauté naturelle et vraie. Il en résulte qu’un vendeur d’esclaves vanterait des corps et qu’Hippocrate en vanterait d’autres. Peut-être pensez-vous que Socrate, dans Xénophon[1], plaisantait en disputant de beauté avec ceux qui passaient pour les plus beaux de son temps. S’il eût parlé simplement de la beauté sans la rapporter aux fonctions et sans les faire entièrement servir de mesure à la beauté, peut-être ses discours ne seraient-ils qu’un jeu ; mais puisque dans tout cet entretien il rapporte la beauté de la structure des formes à la régularité de la fonction, non-seulement il ne faut pas croire qu’il plaisante, mais on doit admettre qu’il parle très-sérieusement. C’est le propre de la Muse de Socrate de mêler tour à tour le plaisant au sérieux. — Ce que je viens de dire est suffisant pour montrer l’utilité du sujet en discussion, et pour enseigner comment il faut entendre les opinions et le dire des anciens. Mais reprenons l’exposition de toute la structure de la main, ne laissant, autant que possible, rien qui

  1. Convivium, cap. v, § 2. Ce chapitre où les considérations scientifiques se mêlent habilement aux plaisanteries du meilleur goût, est un des plus curieux monuments de l’esthétique socratique.