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DES HABITUDES.

d’un régime auquel on est habitué[1]. Érasistrate, dans le second livre Sur la paralysie[2], paraît être aussi du même avis qu’Hippocrate sur toutes les habitudes. Outre Hippocrate et Érasistrate, il n’est aucun médecin ancien qui ait trouvé une cause incontestée et acceptée par tous, du fait que je viens de rapporter[3], ou des

  1. La polémique est le premier but et le fond même du traité Du régime dans les maladies aiguës ; Hippocrate y combat la mauvaise direction que ses confrères, et en particulier les médecins enidiens, donnèrent au régime des malades. Le point de départ de la discussion, c’est la loi de l’habitude qui a une très-grande puissance, aussi bien dans l’état de santé que dans celui de maladie, et qu’il ne faut jamais perdre de vue, quoi qu’on fasse pour se conserver dans le premier état ou pour sortir du second. La première conséquence de ce principe, c’est que tout changement brusque, en un sens ou en un autre, est essentiellement nuisible, et qu’il l’est d’autant plus que les autres circonstances sont plus défavorables ; la seconde, c’est qu’il ne faut produire aucun changement sans en contre-balancer l’effet par un autre changement qui devient alors une solide compensation. (Voy. aussi Articulations, § 87, t. IV, p. 327, et l’Argument de M. Littré, p. 73) — Les mêmes idées sont très-nettement, quoique très-brièvement exprimées dans la première section des Aphorismes ; on les retrouve encore dans le traité De l’ancienne médecine (§ 9 et suiv.), et presque dans les mêmes termes que dans celui Du régime. C’est même là un des arguments de M. Littré, pour revendiquer en faveur d’Hippocrate le traité De l’ancienne médecine. Comme ce n’est pas ici le lieu de discuter cette question, je ferai seulement remarquer que Galien ne dit pas un mot de ce traité, ni dans son commentaire sur celui Du régime dans les maladies aiguës, ni dans l’opuscule Sur les habitudes.
  2. Ce traité d’Érasistrate est encore cité par Galien dans le IIe livre de son Commentaire sur la ire section du Prorrhétique (§ 84, t. XVI, p. 673), et par Cælius Aurelianus (Chronic., II, 1, p. 363, édit. Almel.). M. Rosenbaum (notes de la nouvelle édit. de l’Histoire-de la médec. de Sprengel, t. I, p. 538) pense que ce traité pourrait bien être le même que celui qui est cité par Galien, sous le titre Περὶ τῶν παρέσεων (Adv. Erasistrateos, etc., chap. i, t. XI, p. 192). — Dans la note précitée de M. Rosenbaum, on trouvera la liste des écrits d’Érasistrate dont il ne reste malheureusement que les titres et quelques fragments.
  3. C’est-à-dire des inconvénients ou de l’innocuité de la chair de bœuf. Hippocrate, dans le traité De l’ancienne médecine (§ 11, t. I, p. 594), a expliqué les inconvénients d’un changement brusque de régime, il les attribue à la faim, c’est-à-dire à l’une de ces deux circonstances, que le corps n’avait pas encore faim quand on lui a donné des aliments à une heure inaccoutumée, ou qu’on l’a laissé avoir trop faim en ne lui donnant pas à l’heure habituelle ceux qu’il réclame. Voilà, pour l’heure du repas. Quant à la qualité des aliments, Hippocrate me parait bien près d’attribuer, comme le fait Galien, à la conformité de nature, la puissance des habitudes. Le passage suivant du traité De l’ancienne médecine (§ 20, p. 623) est très-remarquable sous ce rapport, et il me semble que si