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DES MŒURS DE L'ÂME.

aucune vertu qui soit plus forte que le penchant naturel qui nous entraîne au plaisir, nous serions tous mauvais, la meilleure puissance étant la plus faible, et la plus mauvaise étant la plus forte ; mais si ce qu’il y a de meilleur est le plus fort, qui a persuadé aux premiers hommes de se laisser vaincre par la puissance la plus faible[1] ?

Posidonius[2], le plus savant des stoïciens, rejetait ces opinions ; aussi est-il blâmé par les stoïciens pour les doctrines qui lui méri-

  1. Ce passage est certainement un des plus altérés de tout le traité qui nous occupe. Voici d’abord le texte. J’ai mis entre parenthèse les leçons du ms. de Florence : Ἐπεὶ τοίνυν εἰ μὲν μηδεμίαν ἔχομεν ἑτέραν ἐν ἡμῖν δύναμιν οἰκειωμένην (οἰκειώμεθα) ἡδονὴν ἢ (ἡδονῇ) μᾶλλον ἀρετὴν, μᾶλλον ἡδονῇς ἢτις ἰσχυροτέρα τῆς πρὸς τὴν ἡδονὴν ἀγούσης ἡμᾶς φύσει (ἡμᾶς ἐστι φύσεως), καὶ (κἂν) οὕτως εἴημεν ἅπαντες κακοὶ, τὴν μὲν κρείττονα δύναμιν καὶ (om.) ἀσθενεστέραν, ἰσχυροτέραν δὲ τὴν μοχθηρὰν ἔχοντες, ἣ δὴ (ἤδη) κρείττονος (κρεῖττόν) ἐστιν ἰσχυροτέρα (—ον) ἥ (om.), τίς τοὺς πρώτους ἀνθρώπους ἀνέπεισεν ὑπὸ τῆς ἀσθενεστέρας νικηθῆναι : « Si igitur in nobis nullam aliam habemus virtutem familiariorem delectatione, major erit delectatio quam virtus, et ita erimus omnes mali, majorem quidem virtutem imbecilliorem, fortiorem vero eam quæ prava est habentes ; si vero ea quæ est meliorem (sic) fortior quos prius homines induxit ab imbecilliori vinci, trad. de l’édit. de 1528. — Igitur si nullam alliam in nobis habemus vim, voluptati addicti et familiares erimus ; si vero aliam meliorem ad virtutem ducentem, quæ sit imbecillior quam natura nos ad voluptatem invitans, sic etiam omnes vitiosi erimus, vim potiorem imbecilliorem habentes, pravam autem violentiorem, at si melior vis sit quoque valentior, quodnam ab initio homines a debiliore superari persuasit, trad. des Juntes. » — On voit d’abord que cette dernière traduction se rapproche un peu plus du texte de Florence que de celui de Chartier, tandis que la traduction de 1527, qui du reste a sauté par-dessus les difficultés, est plus voisine de ce dernier texte. J’ai tâché de corriger les deux textes l’un par l’autre et par les traductions. Je lis δύναμιν ᾠκειωμένην μᾶλλον ἡδονῆς ἢ μᾶλλον ἀρετὴν ἥ τις ἰσχυροτέρα τῆς πρὸς τὴν ἡδονὴν ἀγούσης ἡμᾶς φύσεως, enfin, je change ἤδη ou ἣ δὴ en εἰ δή, et pour le reste de la phrase j’adopte le texte de Florence.
  2. Voy. sur la doctrine et les écrits de Posidonius d’Apamée ou de Rhodes l’excellent travail de J. Bake, intitulé : Posidonii reliquiæ doctrinæ, Lugd. Batav. 1810, in-8o.— D’après Suidas, Posidonius avait été surnommé l’athlète, et dans un passage du traité des Dogmes d’Hipp. et de Platon (VIII, t. V, p. 652), Galien attribue sa supériorité, comme philosophe, à ses connaissances étendues en géométrie. On sait que Galien se vantait lui-même beaucoup d’être très-versé dans cette branche des mathématiques. — Bake ne paraît pas avoir connu ce que Galien rapporte sur Posidonius, dans le traité qui nous occupe, sans doute parce que cet habile critique n’a lu les œuvres du médecin de Pergame que dans l’édition de Bâle où ce traité est mutilé à la fin ; aussi, n’a-t-il pas connu le titre