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DES MŒURS DE L'ÂME.

calités diffèrent les unes des autres pour produire des hommes meilleurs ou pires (p. 747 d). » Évidemment, dans ce passage, l’auteur dit que les localités produisent des hommes meilleurs ou pires. — Puis, plus loin, il ajoute : « Les uns sont rendus monstrueux et difformes par les vents de toute espèce et par l’insolation, les autres par les eaux, les autres enfin par la nourriture qu’on tire de la terre ; car la nourriture peut non-seulement rendre le corps meilleur ou pire, mais donner encore à l’âme toutes les qualités dont nous avons parlé plus haut (ibid.). » Dans ce passage, il est établi clairement que les vents, et que l’insolation, c’est-à-dire la chaleur du soleil, agissent sur les puissances de l’âme. — Peut-être certains philosophes pensent que les vents, l’air ambiant, chaud ou froid, la nature des eaux ou la nourriture, peuvent rendre meilleure ou pire l’âme humaine, mais que ces circonstances donnent à l’âme de bonnes ou de mauvaises qualités, sans l’intermédiaire du tempérament, car ces qualités seraient [dans l’opinion de ces philosophes] une conséquence de l’intelligence. Quant à moi, je sais clairement que chaque espèce de nourriture est d’abord introduite dans l’estomac, où elle subit une première élaboration, qu’elle passe ensuite dans les veines qui vont du foie à l’estomac, et qu’elle forme les humeurs du corps, lesquelles nourrissent toutes les parties, et avec elles le cerveau, le cœur et le foie. En même temps qu’elles sont nourries, les parties deviennent plus chaudes, plus froides ou plus humides que dans l’état normal, étant rendues semblables aux humeurs qui prédominent[1]. Que ceux donc qui se refusent à admettre l’efficacité de la nourriture pour rendre les hommes ou plus sages ou plus dissolus, ou plus incontinents ou plus réservés, ou plus hardis ou plus timides, ou plus sauvages ou plus civilisés, ou plus amis de la dispute et des combats, revenant à de meilleurs sentiments, m’interrogent pour apprendre de moi ce qu’il faut boire ou manger, car ils profiteront puissamment sous le rapport de la philosophie morale, et en outre ils imprimeront un progrès aux vertus de l’âme logique, en devenant plus intelligents, plus studieux, plus prudents, et en acquérant de la mémoire ; en effet, je les instruirai non-seulement sur les aliments, sur les boissons et

  1. Voy. dans ce volume le chap. ii du traité Des habitudes.