Page:Gaillard - Le Royaume merveilleux, 1917.djvu/13

Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Évidemment ce système en est à son début et il faudrait le perfectionner. Vous n’ignorez pas sans doute qu’aux Arts et Métiers existe déjà un modèle d’avion volant sans moteur, à côté de l’Avion d’Ader.

« Je n’ignore pas que des fous ont déjà essayé de voler sans moteur et ont piteusement échoué. Mais ceux-là étaient des visionistes, tandis que moi je suis aviateur de métier, ayant accompagné maintes fois Legagneux dans ses ascensions.

« J’ai étudié à fond les courants aériens et suis persuadé qu’à tout moment l’aviateur peut trouver le courant propice pour obtenir la vitesse désirée. »

Lucien convoqua Jules Larmion pour le lendemain à deux heures de l’après-midi.

Le signataire de la sixième demande, Pierre Dubois, était l’inventeur d’un métal, mélange d’éléments purs avec de l’aluminium. Par son dosage rationnel et grâce à une trempe, qui était son secret, il était parvenu à faire des plaques de cinq millimètres, impénétrables à deux cents mètres, aux balles de fusils, de mitrailleuses et même d’obus de 75 millimètres. « Mes plaques soumises à la Commission d’examen, aux Invalides, ont donné des essais concluants. Elles n’ont pas été acceptées parce que leur alliage contenait une certaine quantité d’or et de platine, ce qui rendait le prix de revient excessivement cher, presque cent fois plus que le coût habituel. »

Si cet homme dit vrai, pensa Lucien, ce n’est pas cela qui m’arrêterait. Il le convoqua pour trois heures de l’après-midi.

Quand il eut fini, il se dirigea vers l’appartement de Linda. Veux-tu sortir un peu ? lui dit-il. Tu dois t’ennuyer toute seule. Oh, non, mon Lucien, répondit Linda, je ne m’ennuie pas quand je suis seule, car je sais que tu travailles pour la grandeur de ma patrie, pour l’émancipation de ma race, et je me sens heureuse d’être l’épouse d’un héros tel que toi.

Tu persisteras donc toujours à voir en moi un homme différent des autres mortels ? Pourquoi cela ? demanda Lucien. Parce que cela est, répondit Linda. Je te vois entouré de l’auréole qui ornait le Christ en venant sur terre, et tu es pour moi le messie qui rendra à ma race spoliée ce que l’usurpateur lui prit.

Crois-tu donc que je réussirai ? demanda Lucien. Oh, oui, dit Linda, j’en suis sûre.

Eh bien, moi je ne le suis pas du tout. Ne sais-tu pas que l’A. B. C. peut nous encercler comme dans un étau, que nous ne pouvons