Page:Gaillard - Dans un monde inconnu, 1916.djvu/24

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 20 —

Comme vous ne me semblez pas bien riche, je vous compterai cent vingt cinq francs par mois pour le tout, bien que j’ai des pensionnaires qui payent le double.

— J’accepte, madame. Toutefois je vous dirai que je ne compte guère rester à Lima voulant me rendre dans l’intérieur.

— Vous resterez le temps que vous voudrez. En attendant voulez-vous dîner avec moi ? Nous causerons du pays.

— Avec plaisir, madame, car j’ai vraiment faim. Peu après Lucien et son hôtesse s’attablaient dans la cuisine. La salle à manger était déjà occupée par les pensionnaires.

— Avez-vous des parents ? demanda la patronne.

— Non, madame, je suis orphelin.

— Moi, dit-elle, je suis veuve. Voilà cinq ans que mon mari est mort. Il était employé au consulat. J’ai une petite rente que l’État Belge me fait et avec ma pension de famille j’arrive à nouer les deux bouts. Je n’ai pas d’enfant, non plus, mais quelques cousins et cousines à Liège que je n’ai plus revus depuis vingt ans que je suis à Lima.

Le repas continua ainsi en causant de choses futiles. Dès qu’il fut terminé, Madame Rasquin conduisit son pensionnaire dans sa chambre puis alla vaquer à son ouvrage.

Lucien se lava, se brossa et peu après descendit.

— Au revoir, madame Rasquin, à tout à l’heure.

— À tantôt, monsieur Rondia, dit celle-ci.

Quelques minutes après Lucien pénétra chez Darbin, il demanda à un commis si le patron était visible.

— Il vient justement de rentrer dit celui-ci.

Peu après il était introduit chez le commerçant.

— Monsieur, lui dit-il, je suis chargé de vous remettre cette lettre. Darbin la décacheta et la lut attentivement.

— Vous êtes liégeois, je crois ? demanda-t-il.

— Oui, monsieur Darbin.

— Moi je suis verviétois, dit celui-ci. J’ai déjà réfléchi à ce que je pourrai faire pour vous. Vous allez rester deux ou trois mois ici puis quand mon gérant d’Arequipa viendra, vous partirez avec lui. En attendant, puisque vous êtes monteur-électricien, vous aiderez au montage de quelques appareils de télégraphie et de téléphonie que je viens de recevoir. Vous aurez six cents francs par mois comme salaire.

— Merci bien, monsieur Darbin, dit Lucien. Demain à la première heure je serai chez vous.

Dès qu’il fut sorti il retourna chez lui et écrivit à Jules le résultat de sa première démarche.