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La troisième maison, à main gauche, porte comme enseigne In de Stad van Antwerpen ! C’est là que vous devez entrer. Après avoir remercié l’agent, Lucien s’empressa de se diriger vers l’endroit indiqué. Quinze minutes après il y parvenait ; en entrant il avait remarqué une plaque de cuivre portant : Louis Van Mulder, Shipping Master. C’est tout à fait ce qu’il me faut pensa Lucien.

Dès la porte franchie il se trouva dans une salle fumeuse remplie de consommateurs.

Presque tous avaient la vareuse de marin et un veston par dessus. Le flamand était causé à toutes les tables. Lucien se dirigea vers le comptoir où se tenait un homme d’une cinquantaine d’années, à la face rubiconde.

— C’est vous, monsieur Van Mulder ? demanda Lucien en français

Pour vous servir, mon ami, répondit celui-ci dans la même langue.

Vous êtes wallon sans doute ? ajouta t-il ensuite.

— Oui, dit Lucien, de Liége.

— Je connais bien cette ville, dit Van Mulder, pendant dix ans j’ai fait le batelage avec Anvers. Et qu’est-ce qui vous amène ici ? Vous êtes marin sans doute ?

— Je ne le suis pas, mais je voudrai bien l’être, répondit Lucien.

— Quel est votre métier ? demanda le patron.

— Monteur-électricien, dit Lucien, mais je ferai bien le soutier ou chauffeur.

— Il vous manque le principal, dit Van Mulder, le certificat d’immatriculation qu’on exige de tout marin.

— Voulez-vous accepter un verre ? dit Lucien. Nous causerons mieux assis qu’au comptoir.

Avec plaisir, dit le shipping-master.

Peu après, attablés devant deux bouteilles de stout, Lucen reprenait : Si vous me trouvez une place de soutier pour une ligne allant vers l’Amérique du Sud je vous donnerai, en dehors de votre courtage habituel, une livre sterling pour vous.

— Écoutez, mon ami, dit Van Mulder, je peux vous donner une place comme vous le demandez. J’ai plusieurs certificats d’immatriculation que des marins m’ont laissés en gage n’ayant rien d’autre en garantie.

Mais ce service vaut au moins cinquante francs en dehors de ma commission.

Si vous acceptez vous pouvez embarquer après-demain matin sur le Napo de la Pacific Steam Navigation Company qui part pour le Callao.

J’accepte, dit Lucien. Tirant son porte-monnaie il donna au shipping-master deux livres sterling.