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le fort et le château saint-louis

par trois différents retranchements de barriques et de sacs pleins de terre, avec des manières de chevaux de frise. Dans la suite du siège, on fit une seconde batterie au Sault au Matelot, et une troisième à la porte qui conduit à la rivière Saint-Charles. Enfin on avait disposé quelques petites pièces de canon autour de la haute-ville, et particulièrement sur la butte d’un moulin qui servait de cavalier »[1].

Le seize octobre au matin, les trente-quatre vaisseaux de la flotte anglo-américaine jetèrent l’ancre dans la rade de Québec, et une chaloupe se détachant du vaisseau amiral le Six Friends, vint amener à la basse-ville un trompette chargé d’une dépêche pour le gouverneur-général. Quelques canots se rendirent à la rencontre de l’envoyé de Phipps, qui fut reçu avec politesse, mais que l’on pria de vouloir bien se laisser bander les yeux. Alors commença une comédie qui fut exécutée avec le sérieux le plus parfait. Quelques soldats, toujours les mêmes, battaient du tambour, criaient, appelaient, faisaient semblant d’être ahuris par la foule ; puis, courant un peu plus loin, recommençaient le même manège, et cela tout le long du chemin suivi par le trompette. Les sonneries de clairons, les roulements de tambours se répétaient si souvent que l’envoyé de Phipps dut croire que la ville était remplie de soldats. On se bousculait autour de lui, on le pressait, on le heurtait comme par accident pour lui faire croire qu’il était au milieu d’une grande multitude ; on enlevait et replaçait avec fracas les chevaux de frise qui se trouvaient sur son passage. Bref, on le conduisit au Château de la façon la

  1. Cette butte est encore très visible. Elle forme un enclos à part, au haut de la rue Mont-Carmel, et a gardé son caractère militaire. On y voit deux petits canons. — E. G.