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révélations m’attestaient que vous étiez tout à la fois innocent et coupable. Je gardai le silence, même avec vous, car la vérité n’eût pu que troubler inutilement votre conscience à propos d’un mal sans remède.

— Je suis donc un meurtrier ! s’écria le comte avec désespoir.

— Oui, mais un meurtrier involontaire, répondit le docteur. Je ne saurais vous rendre moralement responsable d’un crime commis en état de rêve, alors que la raison n’est plus la règle des actions. Cet événement déplorable doit vous causer d’éternels regrets, mais non pas des remords, car votre conscience y fut complétement étrangère.

— Quand bien même, répliqua le comte, je réussirais à apaiser ma conscience à ce sujet, Béatrix, qui sait cet horrible secret maintenant, qui l’a surpris pendant mon sommeil, pourra-t-elle jamais l’oublier ? Ne serai-je pas toujours à ses yeux un assassin, l’assassin de sa meilleure amie ? Ah ! je suis bien malheureux ! s’écria-t-il au milieu d’un sanglot en se cachant la figure dans ses mains.

— Espérez, repris le docteur. Il arrive souvent