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Le comte s’arrêta un instant.

Béatrix restait immobile de terreur.

Le comte reprit :

— Je ne sais comment cela se fit, mais, durant la nuit, cédant à une espèce de vertige, je me levai, je me dirigeai vers l’appartement de ma femme, je m’approchai de son lit. Un flacon de laudanum était posé sur sa table de nuit ; j’en versai le contenu dans un verre. J’hésitais encore, ma main tremblait. Une sueur froide me couvrait le front. En ce moment, par malheur, ma femme s’éveilla à demi.

— « Amélie, lui dis-je, vous êtes agitée, prenez cette potion. » Je lui soulevai la tête et lui approchai le verre du bord des lèvres. Elle obéit instinctivement à ma voix, et but ce que je lui présentais sans en avoir conscience. Le lendemain, elle était morte ! Tu vois maintenant, Béatrix, combien je t’aimais !

Au même instant, la lune, passant entre deux nuages, éclaira le visage du comte.

Béatrix put voir ses yeux fixes et convulsés.

Tremblante, éperdue, elle dégagea vivement