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Le comte pâlit, mais il jura.

Béatrix observa cette pâleur subite, et fut douloureusement frappée au cœur.

— Je n’ai pas encore son secret ! se dit-elle.

Pendant la nuit, l’esprit troublé par mille suppositions, elle ne dormit pas. Cette longue dissimulation de la part de son mari l’affligeait profondément, mais il souffrait ; aussi, ne songeait-elle à surprendre ce mystère qu’afin de pouvoir partager sa tristesse ou la guérir.

Tandis qu’elle se livrait à ses réflexions, un bruit partant de la chambre du comte vint frapper son oreille : elle entendit distinctement ouvrir une croisée et marcher avec agitation.

— Peut-être est-il malade ? pensa-t-elle.

Inquiète, elle se leva doucement et passa dans l’appartement de son mari. Malgré le froid de la nuit, la croisée restait ouverte. Le ciel, chargé de nuages, voilait à demi les rayons de la lune. À la faveur de cette clarté incertaine, Béatrix entrevit le comte assis sur le bord de son lit, dans l’attitude d’un homme accablé par une profonde douleur.

S’étonnant qu’il ne l’entendît pas venir, elle s’approcha ; mais il ne fit aucun mouvement qui témoignât qu’il s’apercevait de sa présence. Alors, saisie d’un vague effroi :