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Enfin, à l’excessive mobilité des muscles de son visage à la vivacité de ses mouvemens, et jusqu’à son pas sec et rapide, on devinait une impressionnabilité nerveuse presque fébrile qui contrastait étrangement avec ce corps d’athlète.

Le comte de Montbarrey avait environ quarante ans. À cet âge, l’homme que n’ont point usé le travail excessif ou la débauche atteint à l’apogée de sa force. Arrivé au sommet de la vie, il y a pour lui un moment d’arrêt pendant lequel il jouit de toutes ses facultés dans leur plus complet développement. C’est l’âge des grandes passions et des grandes œuvres de la pensée. Il semble qu’alors l’homme retrouve la vigueur et l’enthousiasme de ses jeunes années ; on dirait que l’organisme entier se révolte contre la période de décadence, et qu’il déploie une surabondance de vie afin de retarder cette époque fatale. Lorsqu’un homme de quarante ans porte son activité vers l’amour, au lieu de la diriger vers l’ambition ou vers les spéculations de l’intelligence, il supplée à la jeunesse qui lui manque par le raffinement et la profondeur de la passion. Et quand un homme comme le comte de Montbarrey a fait de l’amour la principale occupation de sa vie, il apporte dans ce sentiment