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Un domestique parut.

L’arrivée d’une personne indifférente suffit toujours pour calmer les plus grandes émotions.

La marquise demanda le thé, et, pendant qu’on le servait, elle acheva de se remettre. Quand le domestique se fut retiré,

— Mon cher comte, dit-elle, oubliez ce qui s’est passé tout à l’heure ; à cette condition, je vous pardonne.

Un amant vulgaire eût galamment protesté contre la possibilité d’oublier un pareil instant de bonheur. Mais les sentimens profonds haïssent les banalités ; aussi le comte garda-t-il le silence.

— Quant à vous accorder un autre sentiment que l’amitié, jamais ! continua Béatrix avec résolution.

— Oh ! madame, répondit le comte d’une voix altérée, ne me faites pas l’injure de croire que j’aie la présomption de vous inspirer de l’amour. J’ai cédé tout à l’heure à l’entraînement d’une passion longtemps contenue, mais non point à un mouvement de fatuité. Mon âge