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ries, aussi bien que les vôtres à l’égard de Paul, ont dans ces derniers temps passés toutes imites. J’ai eu, du reste, trop à souffrir, pendant les quelques années que j’ai vécu avec vous, pour n’avoir pas à me féliciter, sous tous les rapports, de cette séparation.

» Adieu donc et pour toujours.

» henriette de vaudrey. »

Renée demeura confondue par la lecture de cette lettre. M. de Vaudrey pouvait-il ainsi juger sa conduite ? Ne la lui avait-elle pas expliquée ? Cependant elle se rassura en pensant que cette épître fulgurante avait bien pu n’être dictée à Henriette que par la vengeance. D’ailleurs, elle préféra une franche rupture avec sa sœur à des dehors hypocrites.

Quant à Gabrielle, elle tarda longtemps à donner de ses nouvelles. Nous transcrirons ici sa première lettre à Renée ; parce que cette lettre fait connaître la situation de cœur et d’esprit dans laquelle se trouvait la pauvre sacrifiée.

« Que te dirais-je ? comment pourrais-je réunir deux idées, puisque toutes les cordes de mon âme ont été brisées, toutes, excepté pourtant celle qui vibre à ton souvenir, ma bonne Renée. Tu me demandes ce que je fais à Morges, si je pense pouvoir supporter ma vie nouvelle, et tu m’adresses quelques questions sur le château que j’habite et sur le caractère de M. de Morges.

» Depuis mon arrivée ici, je suis plongée dans un tel abattement que je remarque à peine les objets qui m’environnent. Le château m’a paru triste et maussade. Est-ce un effet de ma propre tristesse ? Quoi qu’il en soit, j’ai déjà bien des fois regretté le vieux Domblans, peuplé pour moi de si chers souvenirs.