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homme effraya presque Gabrielle mais en même temps cet amour si vrai la toucha.

— Il m’aime donc, celui-là, pensa-t-elle.

Elle hésitait encore à répondre lorsque, levant les yeux sur M. de Morges, elle vit de grosses larmes rouler sur ses joues. La passion, la douleur transfiguraient son visage ; alors, entraînée par la bonté de son cœur :

— Eh bien ! soit, dit-elle, je vous accorde ma main.

Elle se leva et quitta brusquement M. de Morges toujours à genoux. Quand elle fut à quelque distance, elle se retourna, et le vit dans la position la plus burlesque, faisant de vains efforts, employant ses mains pour se remettre sur ses pieds. Un fou rire la prit. Elle courut dans la chambre de Renée, et se jeta au cou de sa sœur en riant convulsivement ; puis cette gaîté nerveuse se changea en sanglots étouffés. Quand Renée eut réussi à la calmer en lui prodiguant ces tendres caresses qui magnétisent les souffrances de l’âme, la pauvre Gabrielle lui conta de quelle manière elle venait de se fiancer à M. de Morges.

— Mais, puisque ce mariage te cause tant de chagrin, pourquoi y consentir ? lui demanda Renée

— Que m’importe ?… Paul ne m’aime pas, répondit-elle avec un abattement qui effraya sa sœur.

Toutefois, Renée espéra que ce mariage ferait diversion à l’amour de Gabrielle et pourrait à la longue effacer de son cœur le souvenir de M. de Vaudrey.



IX


Il fut décidé que le mariage d’Henriette et celui de Gabrielle se célébreraient le