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VIII.


Huit jours s’écoulèrent, pendant lesquels se rétablit, en apparence, la santé de Gabrielle ; mais la douleur devait laisser d’ineffaçables traces dans cette âme profonde et délicate. Elle devint chaque jour d’une humeur plus irrégulière ; tantôt elle s’abandonnait à de tristes rêveries, tantôt elle était prise d’une gaîté fiévreuse, qui rappelait un instant la vie et une expression fugitive de bonheur sur son visage morne et abattu. Souvent, elle attachait sur Paul un regard étrange qui trahissait autant de répulsion que de tendresse.

Le fat souriait d’une aversion qui lui semblait affectée et qu’il regardait comme une marque d’amour. Renée seule s’apercevait du dangereux état de Gabrielle. Quant à M. de Charassin, loin de démêler les causes du chagrin de sa fille, il n’en apercevait même pas les symptômes extérieurs.

Le bon père, d’après l’avis d’Henriette, avait chargé Joseph Duthiou d’un travail qui devait le tenir éloigné pendant quelques mois. Henriette était donc tranquille de ce côté ; mais elle conservait une certaine inquiétude relativement à Paul dont l’exquise politesse se nuançait parfois à son égard d’une légère teinte d’ironie. Cependant elle espéra que la fâcheuse impression qui pesait sur l’esprit de son fiancé se dissiperait peu à peu, et, comme le mariage avait été fixé au mois suivant, elle s’occupa tout entière de ses apprêts de toilette.

Un matin, M. de Charassin rejoignit dans le parc ses filles et M. de Vaudrey. Il te-