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— Mon père, je me soumettrai à tout ce que vous ordonnerez, seulement…

— Enfant de mon âme ! dit l’heureux père en serrant fortement sa fille contre son cœur, je te jure que j’ai déjà tout oublié.

— Seulement, reprit Henriette, permettez-moi une objection qui est grave : M. de Vaudrey ne m’aime pas.

— Il ne t’aime pas ! allons donc, tu veux rire ; une belle femme comme mon Henriette ! il serait difficile, par ma foi… S’il n’y a que cette objection, elle est levée, et je m’en fais garant, dit gaîment le baron complètement remis de la secousse qu’il venait d’éprouver.

— Cependant, insista Henriette ; j’ai la presque certitude que votre pupille aime Gabrielle.

— Ta, ta, ta, j’y vois clair, te dis-je… Serais-tu jalouse ? C’est bon signe.

— Je vous dis, mon père, que j’en suis à peu près sûre, et je vous avouerai même que ce qui a beaucoup contribué à me faire prendre la résolution qui vous a tant chagriné, c’est la perspective de rester vieille fille et de voir Gabrielle, de sept ans plus jeune que moi, mariée la première.

— Tu as raison, chère enfant, dit l’excellent homme, ce serait injuste, je ne le souffrirai pas, et je te donne ma foi de Charassin que M. de Vaudray t’épousera, ou n’épousera ni Gabrielle, ni Renée. Mais tu parais avoir oublié qu’il est en mariage, d’autres convenances que celles de l’amour. Veux-tu t’en reposer sur moi, et, dans le cas où je réussirais dans ma négociation, me donnes-tu, là, dans la main, ta bonne petite parole d’Henriette de Charassin, que tu accepteras Paul pour époux ?

— Je vous aime tant ! dit Henriette, en baisant avec effusion les cheveux blancs de