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Quant à Renée, lorsqu’elle fut dans sa chambrette, elle se déshabilla, jeta un peignoir blanc sur ses épaules, et s’accouda sur l’appui de sa fenêtre gothique.

L’atmosphère est tiède et parfumée ; le disque de la lune se découpe nettement sur l’azur foncé du ciel : les ombres et les lumières vivement tranchées prêtent à la nature un aspect fantastique qui favorise la rêverie de la romanesque jeune fille. Elle aussi pense à l’amour, et cette soirée lui a laissé de bien douces espérances ; elle en entretient cette belle nuit et lui raconte les secrets de son cœur. On dirait, à voir cette forme suave, encadrée d’une ogive, une de ces châtelaines captives demandant au ciel un libérateur, ou rêvant à son amant fidèle, dont elle espère le prompt retour.

Mais tout à coup Renée est tirée de sa méditation ; il lui a semblé voir dans le jardin une ombre se glissant au milieu des arbres. Malgré sa frayeur, elle chercha à distinguer ce que pouvait être cette étrange apparition. Bientôt, cette ombre paraissant dans un espace vivement éclairé par la lune, elle put facilement reconnaître la silhouette d’Henriette. Sa surprise fut grande ; curieuse de découvrir pour quel motif Henriette sortait furtivement à pareille heure de la nuit, elle poussa doucement sa croisée et se mit en observation. Jusqu’où n’alla point son étonnement quand elle vit sa sœur soulever une pierre dans le mur et s’emparer d’un papier qu’elle serra soigneusement dans son sein ?

Renée se tortura l’esprit pour deviner quel pouvait être ce mystérieux papier. Une jalouse inquiétude lui vint au cœur. C’est