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ques années une partie de sa fortune. Quand il eut atteint l’âge de vingt-six ans, un peu blasé sur les délices de la vie parisienne, du monde élégant où ses modiques revenus ne lui permettaient pas d’occuper le rang que lui assignait son nom, il résolut de revenir dans le domaine patrimonial jouer au seigneur de campagne ; mais auparavant, afin de réparer la brèche faite à sa fortune, par ses folies de jeunesse, il projeta de se rendre à Domblans, dans l’espoir de conclure un mariage avantageux avec l’une des demoiselles de Charassin.

Lorsqu’il avait écrit à son tuteur pour le sonder sur ce projet, le baron lui avait répondu par ces seules paroles : Venez, voyez et vainquez.

Rempli de fatuité comme la plupart des hommes médiocres, il ne douta pas un instant du succès ; lui qui se flattait de quelques conquêtes parisiennes, il jugea facile de séduire de naïves campagnardes languissant dans la solitude, l’ennui et le désœuvrement. Afin d’atteindre plus sûrement à son but, il résolut de faire la cour aux trois sœurs à la fois, de les envelopper toutes trois également de ces aimables soins, de ces prévenances délicates dont les femmes sont si friandes, et qui en effet, devaient infailliblement tourner la tête à de pauvres filles privées jusqu’à ce jour de tout bonheur pareil.

Or, quand il se vit jeté au milieu de ces trois délicieuses créatures, dont la timidité lui semblait un attrait de plus, il se trouva un peu moins blasé sur l’amour qu’il ne croyait l’être, et, la beauté ne nuisant pas à la dot, il jura, à part lui, sa foi de gentilhomme que huit jours ne se passeraient