ter le chef-d’œuvre que je rêve. La coiffure, c’est la moitié de la beauté de la femme. Quant aux yeux…
— Hélas ! les miens sont loin d’être beaux !
— Sans doute, ils ne sont pas assez fendus ; ils sont surtout un peu trop enfoncés dans l’orbite, comme chez toutes les natures exclusives, disposées aux sentiments intenses et profonds ; mais les paupières sont fines et d’une teinte exquise. Il y a là, sur la tempe, une petite veine bleue adorable, que personne ne songe à remarquer, pas même ton mari, parce que, ne l’ayant pas remarquée toi-même, et n’étant point coquette, tu n’as jamais l’air de dire : regardez mes beautés. Or, ma chère, il faut d’abord être convaincue qu’on est jolie, pour en convaincre les autres.
— Malheureusement, je me vois telle que je suis : j’ai de bons petits yeux assez doux, mais insignifiants ; et il m’est impossible de croire autre chose.
— Cependant, si tu le permets, ces bons petits yeux, nous les agrandirons un peu avec le crayon oriental.
— Oh ! cela, jamais ! protesta avec véhémence Mme de Kéradec. Jamais je ne consentirai à me maquiller ; j’en rougirais, ne fût-ce que vis-à-vis de mes domestiques ; et d’ailleurs, je serais obligée de m’en confesser.