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Alors je serais bien embarrassé, car il y a des siècles que je n’ai adressé la parole à une fille du village.

— Et pourquoi ça, mon garçon ?

— Probablement parce que je n’avais rien à dire.

— Autrefois, tu marquais une grande préférence pour Anna Davy.

— Oui, autrefois, quand nous allions à l’école, mais à présent c’est passé, de son côté comme du mien.

Tante Olympe ne répondit pas d’abord, elle compta premièrement les mailles de son tricot, puis releva la tête et remonta ses lunettes sur son front.

— Quand on cesse de trouver une chose ou une personne de son goût, dit-elle enfin, en regardant son neveu bien en face, c’est généralement parce qu’une autre chose ou une autre personne nous plaît davantage.

— Eh bien, ce n’est pas le cas pour ce qui me concerne, répondit Maxime, il n’y a pas en ce moment dans tout le village une fille qui me plaise plus qu’une autre… Tiens, déjà neuf heures, il faut que j’aille, mais ça me fâche de n’avoir pas de lettre à lui porter.

— Elle l’aura demain, fit tante Olympe un peu sèchement.

Maxime ne répondit pas.

— À quoi penses-tu ? ajouta-t-elle.

— Je cherchais à m’expliquer quelque chose. Je me demandais ce qui fait la différence entre une dame, une vraie, et une campagnarde.

— La différence, tu es encore simple, c’est que l’une habite la ville et l’autre la campagne.

Maxime sourit.

— Non, fit-il, ce n’est pas ça. Mademoiselle Steinwardt et cousine Nellie habitent aussi la cam-